Après trente-deux albums studio, Arno est revenu en humain, tout simplement. Recentré sur la voix, la guitare, la basse et la batterie, Human Incognito est un album qui laisse apparaître une certaine nostalgie mais qui conserve l'énergie qui a fait le succès du plus grand rocker belge. Rencontre épique avec le très direct Arno, avant sa venue aux Oreilles en Pointe 2016.
Vous dites que vous êtes un voyeur de l'être humain et que vous absorbez tout ce qui se passe autour de vous. C'est tout ceci qui vous aide à écrire ?
L'être humain est mon inspiration pour faire de la musique et pour écrire des textes. Comme je l'ai toujours dit, je suis influencé par tout ce qu'il fait de bien mais aussi de mal. Tout le bazar qu'il peut faire. On vit peut-être pour le moment comme dans les années 30. Je n'ai pas vécu cette décennie mais de ce que je sais de l'histoire, on se retrouve dans le même bazar... Le conservatisme est en érection comme la Tour Eiffel. Mais ce n'est pas seulement en Europe. Quand tu regardes ce qu'il se passe en Amérique, avec une figure comme Donald Trump pouvant devenir président des États-Unis... il y a cinq ans c'était impossible.
« Quand je m'ennuie, je suis dans les bars et c'est très mauvais pour mon foie. »
Est-ce que les attentats ont provoqué une réaction des artistes du côté de la Belgique ?
Il n'y a rien eu du tout. Nous ne sommes pas dans les années 60... Aujourd'hui, il n'y a plus de rock'n'roll. Il n'y a plus de révolution dans le rock. Il y a plus de rock dans un salon de coiffure que chez les rockeurs.
Vous parlez seulement de la Belgique ?
Non, je parle du monde entier. Quand tu vas en Amérique, regarde qui a dit des choses qui sont allées contre la campagne aux présidentielles de Donald Trump : The Rolling Stones, Neil Young, ... Ce ne sont que des vieux. Je trouve cela bizarre qu'il n'y ait pas de réaction de la part des jeunes.
Est-ce que vous n'en avez pas marre de faire de la scène ?
C'est ma vie. Je fais ça depuis près de cent-cinquante ans... (rires)
Vous avez dit que quand vous partez en tournée, c'est une période de vacances pour votre corps et votre foie...
Oui, quand je suis en tournée, mon foie est en grève. Je ne m'ennuie pas en tournée. Quand je m'ennuie, je suis dans les bars et c'est très mauvais pour mon foie.
Il paraît que vous enregistrez et mixez très rapidement vos albums. Était-ce également le cas pour Human Incognito ?
Oui, en effet. Je suis très impulsif dans tout ce que je fais. Mais je paie aussi la facture du fait d'être comme ça. C'est mon caractère. Sur Human Incognito, l'enregistrement et le mixage ont duré deux semaines. Mais je n'ai pas travaillé le samedi et le dimanche... Donc ça fait dix jours de travail. J'ai fait l'enregistrement en Belgique et le mixage en Angleterre.
À quoi ressemble la tournée d'un vieux "Motherfucker" (ndlr : référence au premier titre de son dernier album I'm Just an Old Motherfucker) tel que vous ?
Il faut venir hein ! (rires) Je suis avec un batteur, un guitariste, un clavier, et une basse. Ce sont des musiciens qui me suivent depuis longtemps. Mais je n'oublie pas toute l'équipe technique qu'il y a derrière... Nous sommes nombreux sur la route.
Dans la composition, vous laissez de la place aux musiciens ou vous dirigez tout ?
Je prends toujours des musiciens qui jouent mieux que moi, c'est beaucoup plus facile comme ça. Pour répondre à ta question, je ne peux pas trop me prononcer mais il y a un film, Dancing inside my head, qui sort en octobre pour le festival de Gand et qui montre comment je travaille en studio. Tout est expliqué dans le film mais je ne l'ai pas vu... Je n'aime pas me regarder, ce n'est pas bon pour le moral.
« Quand je suis sur une scène, je suis sur une scène... Je joue pour les êtres humains »
Lorsqu'on écoute Human Incognito, on sent une pointe de nostalgie. Seriez-vous en train de devenir nostalgique, vous qui avez toujours été plutôt positif ?
Je n'aime pas la nostalgie. Mais je suis d'accord, j'étais nostalgique au moment de composer cet album. Un album représente un moment de ma vie. J'ai vécu avec mon cul dans le beurre dans les années 60, 70 et 80... Aujourd'hui, pour les jeunes, c'est une période difficile. Mais je sens qu'il y aura bientôt une nouvelle révolution. Il y a de nombreux jeunes qui font des études pour des métiers qui n'existeront plus dans cinq ans. C'est une chose assez bizarre.
As-tu une image de Saint-Étienne et de sa région ?
Ce n'est pas très loin de Lyon je crois. J'ai deux enfants avec une Lyonnaise. J'ai un fils qui est né à Lyon mais il est déjà plus grand que moi... Il a 28 ans. À Lyon, j'ai toujours bu du bon vin. Mais à Saint-Etienne aussi. J'y étais il n'y a pas très longtemps pour un festival et j'ai bu un bon vin. Les anges ont pissé dans ma bouche !
D'ailleurs, préférez-vous jouer en plein air ou dans une salle ?
Quand je suis sur une scène, je suis sur une scène... Je joue pour les êtres humains.
Merci Arno. À bientôt !
Sois sage ! Fais des bêtises, pense à moi !
Soirée des machines infernales : Arno [+ Erwan Pinard], samedi 19 novembre à 20h30 à la Forge au Chambon-Feugerolles