La Do, son Olympia c'est la rue

Portrait / Elle donne de la voix en toutes saisons dans les rues de Saint-Étienne. Rencontre avec un personnage aussi atypique qu’attachant.

Qui n’a pas déjà croisé cette chanteuse dont le sourire malicieux habite les rues du centre-ville stéphanois, entre les arcades de l’Hôtel de Ville et la place du Peuple ? Qui ne s’est pas déjà demandé qui est cette femme que même une mauvaise météo ne semble pouvoir décourager de pousser la chansonnette ? Née Dominique, Domi a finalement opté pour La Do. Un pseudo en deux syllabes efficaces et suffisantes, deux notes de musique à qui l'on a retiré le Si, car avec des "Si on mettrait Paris en bouteille". Paris... Paname... Une ville où la chanteuse a traîné ses guêtres, en d’autres temps. Mais les rues de la capitale ne font pas de cadeau aux artistes du macadam. Macad'âme... Alors voilà huit ans, La Do a posé ses valises et ses partitions à Saint-Étienne. Il faut dire que la chanteuse a déjà eu plusieurs vies, autant de fleuves intranquilles qui ont coulé sous les ponts d’une existence riche de rencontres et surtout de musiques. La Do chante comme elle respire, amoureuse éperdue de la poésie des mots et des mélodies qui les portent. Poètesse jusqu’au bout des ongles, elle écrit en vers ou en prose mais elle préfère le plus souvent faire siens les textes des autres, ceux des grands paroliers de la chanson française ou de leurs illustres interprètes. La Do chante Piaf, Ferré, Brel, Barbara, Gainsbourg, Lama, mais ne s’impose aucun carcan, tant que les textes lui permettent de distiller ses états d’âmes et de partager sa passion pour la chanson avec les passants que sa prestation interpelle. Elle pioche alors parmi les tubes de Jean-Jacques Goldman ou de Kendji Girac : « C'est une façon de voir la vie / Un peu plus grand qu'un pays / Un destin, un regard / C'est de la musique et des cris / Un pour tous, et tous réunis / Un chemin, une histoire. »

Libre comme l’air

La Do n'a pas d'âge. Ne le lui demandez pas. Elle s’amuse elle-même à dire : « je n’ai pas choisi de traverser le vingtième siècle. » Vous ne saurez rien de sa vie privée, c’est un domaine bien gardé. Lorsqu’on lui demande de regarder dans le rétroviseur des années passées, elle avance sur la pointe des pieds, évoque son enfance près du Havre, ouvre des tiroirs qu'elle referme aussitôt. La Do semble s’être forgée une carapace qui cache une sensibilité béante, un parcours sinueux semé de coups durs qu’il vaut mieux oublier. La Do préfère parler encore et encore de chansons, à travers lesquelles elle parle sans doute d’elle-même en filigrane. Quand Dalida chante « Moi je veux mourir sur scène », La Do préfère se moquer de la grande faucheuse en sortant de son sac les deux CD qu’elle propose à son public éphémère. « Avec ces deux disques je pourrai encore chanter à titre posthume ! ». Pétrie d’humour, toujours le bon mot au coin de la bouche et le rire communicatif, La Do est une femme attachante, fondamentalement humaniste et par-dessus tout libre. Libre comme l’air. L’air d’une chanson que l’on fredonne sans savoir pourquoi. L’air de rien. L’air du temps. Se tenant à l’écart de tout discours politique ou de toute considération religieuse, aux affres de notre époque troublée, La Do répond avec sa propre prose à cœur ouvert : « Liberté, tu es nos ailes qui s’envolent vers l’amour fraternel, dont le fruit et le partage entre tous les peuples et nulle humanité ne peuvent vivre sans ta lumière. » La Do a toujours chanté, depuis toute petite et plus tard chez les Scouts. Elle en fait son métier à sa manière, hors show business, un choix totalement assumé, dans l’unique but de conserver toute sa liberté. « Vous savez, mon Olympia, c’est la rue ! »

De la chanson au théâtre

La Do vit dans l’instant, là, maintenant, devant vous. N’allez pas la chercher ailleurs. À force d’incarner les personnages de ses chansons, elle en est devenue un à part entière. Elle cultive un look androgyne avec son perfecto et son chapeau façon Michael Jackson. Sur son second CD, enregistré dans les locaux d’Ursa Minor, La Do reprend treize titres a capella, dont deux sont dédiés à ses parents disparus. A son père, Le France, comme un hommage à la fierté des marins. Et à sa mère, Des roses blanches, de Tino Rossi. Si elle reste taiseuse sur sa propre histoire, la chanteuse aime écrire sur sa région natale : « Ma Normandie. Je vais vous la rendre familière comme toutes les choses parées de nostalgie. Tout un chapelet de petits villages en dessine le caractère, de vieilles fermes du temps passé en incarnent la douceur de vivre. De ravissantes vallées spacieuses nourrissent le tableau de ce site bercé de poésie éternelle. » En arrivant à Saint-Étienne, La Do avait tout d’abord trouvé la ville un peu grise. Puis, au fil de ses rencontres et de ses prestations, elle a découvert de belles personnes qui lui ont fait prendre la mesure de la richesse de notre cité : l’auteur et metteur en scène Stéphane Raveyre, mais aussi Fourmi, rencontré dans la friche Mosser à Bellevue, ou encore des musiciens comme Fabien Kanou. « J’ai aussi découvert des lieux incroyables comme le Musée de la mine ou le Chok Théâtre. » Depuis que Stéphane Raveyre (compagnie La Réserve) a fait appel à sa voix pour une création in situ dans la cour du Parc-Musée de la Mine jouée en mai 2014, La Do ne demande qu’à renouer avec le théâtre. Elle interprétait dans Victoria une Marseillaise tonitruante, chantée avec les tripes, scotchant l’auditoire par son intemporalité toute théâtrale. Assurément, La Do a plus d’une corde à son arc. A bon entendeur…

Sa playlist du moment

Je ne veux pas travailler (Pink Martini)

Vivre ou survivre (Daniel Balavoine)

Perlimpinpin (Barbara)

Comme d’habitude (Claude François)

La Parisienne (Marie-Paule Belle)

Salama Ya Salama (Dalida)

L'homme à la moto (Edith Piaf)

Souviens-toi (Florent Pagny)

Le chasseur (Michel Delpech)

Color Gitano (Kendji Girac)

Du côté de chez Swann (Dave)

La dernière séance (Eddy Mitchell)

Couleur café (Serge Gainsbourg)

Ma gueule (Johnny Hallyday)

C’est extra (Léo Ferré)

Le Chant des Partisans

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