The Wall : À l'abri de rien

The Wall
De Doug Liman (EU, 1h30) avec Aaron Taylor-Johnson, John Cena...

Le film de la semaine / Un soldat étasunien derrière un mur, un sniper irakien de l’autre côté. Doug Liman revisite le duel au soleil cher au western dans ce huis clos en plein air aux accents beckettiens, qui n’hésite pas à renverser certains paradigmes ordinaires. Une tragédie, et un film politique.

2007, fin de la guerre en Irak. Deux sergents étasuniens appelés en renfort sur un chantier découvrent les corps des ouvriers abattus par un sniper, lequel les prend aussitôt pour cible. Si l’un des militaires est touché, l’autre bien que blessé s’abrite derrière un mur de fortune. Et se fait aborder, voire confesser via sa radio par son assaillant…

Décidément, Doug Liman confirme qu’il ne peut s’attaquer à un genre sans essayer de l’hybrider avec un autre — souvenez-vous de son ludique Edge of Tomorrow (2014), en oubliant son Mr. & Mrs. Smith (2005). The Wall opère à présent la rencontre assez inouïe entre un film de guerre US traditionnel (impacts traversant l’écran, gros plan sur genou en bouillie, “continuez-sans-moi-les-gars” etc. ) et une pièce de théâtre absurdo-métaphysique ; un mariage où le verbe et la station prennent le pas sur le bruit brut et l’action. Et cette inversion des perspectives n’est pas isolée.

Sans brique, t’as plus rien

L’ennemi désigné dès le départ se trouve rapidement assimilable à une instance divine : omniscient, omnipotent, invisible, il a de surcroît le pouvoir de vie et de mort sur qui pénètre son territoire. Capable de tromper son interlocuteur en parlant sa langue, révélant sa meilleure éducation (citant Poe entre autres auteurs, l’Irakien raille le troufion lui opposant le seul nom de Shakespeare), il justifie sans argumenter sa position non pas d’agresseur mais de victime d’une invasion au nom de la prédation pétrolière.

Liman va donc très loin dans la transgression, dynamitant plus que son mur — rempart symbolique aussi misérable qu’hypocrite — et offre un final rappelant, par son ironie noire, le grand Sidney Lumet de La Colline des hommes perdus (1965). The Wall constitue, avec le récent Un jour dans la vie de Billy Lynn de Ang Lee, une de ces œuvres mettant à bas le culte du héros outre-Atlantique, néfaste et mortifère. Une future référence, à voir dès aujourd'hui.

de Doug Liman (E.-U., 1h30) avec Aaron Taylor-Johnson, John Cena, Laith Nakli…

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