Ceti Cantat, hypnotique

Vous serez prévenus : Ceti Cantat est un groupe sur lequel il va falloir compter. Hier chenille (le groupe n'a que deux ans d'existence), le voilà déjà papillon. Ils se sont rencontrés à Saint-Étienne, quelque part entre les bancs du conservatoire et l'amphi de la fac de musicologie. Fanny Rapaoly (chant et guitare acoustique), Gaël Bernaud (batterie) et Tom Jallet (guitares), trois jeunes musiciens ligériens qui tracent ensemble depuis le printemps 2016 les contours d'une belle route musicale, de concerts en résidences, débouchant aujourd'hui sur la sortie d'un premier album, Secrets and stories, de toute beauté. Tirant son nom énigmatique du non moins mystérieux chant des baleines, le groupe revendique diverses influences outre-manche comme London Grammar ou Ben Howard, on pense aussi à la fratrie australienne Angus et Julia Stone ou à certaines ballades des frenchies Lilly Wood and the Prick mais au final, Ceti Cantat trouve sans peine sa propre voie.

à lire aussi : L'amoureuse des mots

Quelque part entre ciel et mer, entre acoustique et électrique, le trio dévoile avec délicatesse un univers mélancolique et profond, presque familier. Un clip est en préparation et quelques dates de concerts se profilent à l'horizon. Mais en attendant de retrouver Ceti Cantat en live, jetons un oeil et deux oreilles à cette première galette, enregistrée dans les studios du centre culturel Albert Camus au Chambon Feugerolles, par le très inspiré Olivier Biffaud.

Pépites

Dès le premier titre, That's all show, le son est là, ample, entre pop douce-amère et folk lumineux, avec une voix envoûtante qui tire l'auditeur vers une stratosphère éthérée d'où l'on ne redescendra pas de si tôt... En anglais dans le texte un amour qui, presque, s'excuse. « I can't help it, I can't love you less / Je ne peux pas m'en empêcher, je ne peux pas t'aimer moins... » Les bulles glissent sous la glace dans un silence assourdissant et As one nous laisse en suspension. Il est question de deux âmes qui fusionnent, deux corps aussi, sans doute. La guitare prend le large pour remplir un espace qui s'agrandit encore, la batterie est délicieusement minimaliste... Sur Digging, le ciel s'assombrit, il pleut tout à coup des cymbales et les cordes se font plus âpres. Les esprits confus perdent pied et, s'ils n'y prennent garde, courent à leur perte... « One of the two is going to lose. / L'un des deux va perdre.» Avec Cold days, le manque s'installe dans la brume froide de l'hiver, une tristesse assumée se recroqueville devant le un feu de cheminée... Une mélancolie monochrome s'enracine entre les lignes de This is how, on tente sans trop y croire une dernière supplique, on se sent misérable et le silence ne fait qu'agraver les choses car l'histoire est bel et bien terminée, c'est ainsi... Le titre éponyme Secret and stories clot l'album avec l'improbable espoir d'une issue salvatrice. « Hope we'll find our way through the dust. / J'espère que nous trouverons notre chemin à travers la poussière. » Tirer les leçons, percer le mystère des secrets et le sens des histoires enfouies...

Avec ces six premiers titres Ceti Cantat fait mouche. On se laisse volontiers transporter dans un film qui raconte au ralenti une lente désillusion, avec cette lumière, entre chien et loup, qui efface les repères et nous plonge dans une langueur salée-sucrée parfois hypnotique, nous baladant à travers des paysages aussi vastes qu'intérieurs. Six chansons franchement prometteuses, six petits bijoux regroupés dans un même écrin, un album à se procurer les yeux fermés.

Ceti Cantat, Secrets and stories (Inouïe Distribution)

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Mercredi 5 juillet 2023 Alerte orange au Puy-en-Velay du 17 au 23 juillet : des rafales venant des 4 coins du monde sont à prévoir. Veillez à vous munir d’appuis bien solides, vous (...)
Lundi 5 décembre 2022 Le premier fils, Dimitri, impétueux, sanguin et violent, est le rival de son père, entiché de la même femme que lui. Le second, Ivan, cynique intellectuel athée (...)
Mardi 26 avril 2022 De confinements en couvre-feux, la pandémie aurait presque fait oublier qu’un festival de musiques est avant tout un temps de convivialité partagée, entre amis, dans une foule de mélomanes raisonnablement...
Mardi 26 avril 2022 D’un point d’ancrage à un autre, l’artiste stéphanois porte en lui l’errance joyeuse de ceux qui savent accueillir la vie. Des sens en éveil, une gamberge qui va loin quitte à prendre son temps : portrait d’un poète en quête d’infini.  
Mardi 26 avril 2022 Comme chaque mois, le Méliès Saint-François vous convie à sa grande soirée Quiz, dédiée cette fois-ci (...)
Mardi 26 avril 2022 Voici une belle promesse que nous fait l'Opéra de Saint-Etienne. Tout le monde connaît l'histoire de Lancelot, chevalier de la Table (...)
Mardi 26 avril 2022 Fatigue passagère et moral dans les chaussettes ? La rédaction du Petit Bulletin est là pour prendre soin de ses lecteurs, avec un traitement imparable : les concerts. Et quoi de mieux que le Paroles & Musiques pour se...
Mardi 26 avril 2022 Plus on progresse, plus on se fait du mal et plus on se tue, à petit feu. Avec Bienvenue dans l’espèce humaine, Benoît (...)
Mardi 26 avril 2022 Gerard Watkins revisite le chef-d’œuvre shakespearien à travers le prisme des sixties : pantalons pattes (...)
Mardi 26 avril 2022 Hugo, 23 ans, étudiant en sciences humaines, oscille entre ses origines algériennes et françaises. Lorsque sa mère le (...)
Mercredi 13 avril 2022 Direction le restaurant de la Cité du Design pour un menu du jour digne d’une bonne brasserie avec une vue sur un jardin d’hiver étonnant.
Mercredi 6 avril 2022 Le thème : Bifurcations. La promesse : quatre mois de grande fête autour du design, à laquelle tous les Stéphanois pourraient prendre part. Les questions : la biennale Design sera-t-elle accessible à tous les publics, suffisamment...
Mercredi 6 avril 2022 Troupe amateure mais aussi qualitative que les pros, la LISA organise dès dimanche sa semaine de l’impro, avec au menu, différentes formules… Et pas mal de rigolade.
Mercredi 6 avril 2022 Envie de bamboche, d’une ambiance festive, et de gros son ? Check la liste des soirées qui arrivent, et prépare ton agenda (et ta tenue de gala) : ça sent la grosse bringue.
Mardi 29 mars 2022 Par Sibylle Brunel. Quand les petites bêtises entrainent les grosses, il est difficile de prouver que l’on peut encore répondre à la norme. A-t-on seulement (...)
Mardi 29 mars 2022 Des dernières Biennales Design stéphanoises aux salons du Conseil de l’Union Européenne à Bruxelles, la créatrice textile Jeanne Goutelle marque peu à peu de son empreinte colorée et responsable une œuvre où le réemploi de tissus industriels permet...
Mardi 29 mars 2022 Durant les quatre mois qui vont suivre, la Biennale Design de Saint-Étienne nous invite à « bifurquer ». Envisager la société telle qu’elle est, l’envisager ensuite telle que l’on aimerait qu’elle soit… Puis envisager les chemins possibles...
Mardi 29 mars 2022 Notre civilisation s’effondre, tous les scientifiques le disent. Oui mais alors… Que faire ? Vaste sujet, pourvu que l’on (...)
Mardi 29 mars 2022 Et si la décolonisation n’avait été qu’une succession d’échecs dont on voit et paie encore les pots (...)

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X