Rock / Groupe engagé par excellence, No One Is Innocent poursuit sa route vingt ans après ses débuts. Toujours aussi énergique, le rock du groupe n'a pas pris une ride et son dernier album Frankenstein démontre que la créature n'a pas fini d'en découdre. Rencontre avec Kemar, le chanteur charismatique des [no one is innocent], avant le passage de la formation au Clapier.
Quelle différence existe-t-il entre Propaganda, votre album sorti en 2015 et Frankenstein qui vient de paraître ?
Kemar : Nous avons la sensation qu'il est plus animal, plus organique. On peut ressentir la nervosité du groupe dans les compositions qui sont moins rondes. L'album débute sur le titre À la gloire du marché et on le prend en pleine face ! On se connaît aussi davantage avec notre producteur Fred Duquesne (notamment connu pour son implication dans le groupe Mass Hysteria, NDLR), ce qui donne un son plus acéré que sur notre précédent disque.
Justement, en parlant de Fred Duquesne, il est intervenu la première fois pour vous sur Propaganda, alors que c'est un ami de longue date. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de travailler avec lui ?
C'est très étrange en fait... Ce sont les mystères de la musique. Fred est un pote de bande, on se croise hyper souvent, on sort boire des coups à Paris... À un moment donné, avant de commencer à travailler sur Propaganda, des amis nous disent : « qu'est-ce que vous faites ? Pourquoi vous ne demandez pas à Fred de bosser avec vous ? » Oui, c'était évident au final de le faire intervenir.
Que vous a-t-il apporté dans votre travail et au niveau sonore ?
Nous trouvons que c'est un mec très brillant, intelligent, réfléchi... Il sait également être dans le doute, même s'il apporte une approche très sûre. Il n'est pas borné. Si tu as des choses à défendre, il va faire mine de ne pas t'écouter mais en fait, il enregistre tout. C'est un mec qui permet de maintenir une très bonne ambiance en studio, ça rigole beaucoup et en même temps c'est un grand travailleur. Pour lui, faire un album de No One, ça reste quelque chose d'important, ce n'est pas anodin. C'est un peu le sixième membre du groupe lorsque nous enregistrons.
On a l'impression que No One Is Innocent n'arrête jamais, toujours sur scène ou en studio...
C'est vrai que depuis que l'on a attaqué la tournée de Propaganda en 2015, nous n'avons presque pas arrêté. Il n'y a qu'en 2017 où nous nous sommes un peu calmés pour composer. Ca enchaîne très vite. Nous sommes dans une dynamique géniale où le groupe se sent bien, prend du plaisir à jouer, écrire ensemble. Il n'y a pas d'egotrip entre nous, chacun a sa place. Cela n'a pas toujours été le cas mais aujourd'hui ça l'est. Donc ça donne envie d'y aller, de faire de la musique, de s'investir pleinement. Nous prenons vraiment du plaisir à être ensemble.
No One Is Innocent est un groupe engagé depuis ses débuts. Comment ressentez-vous l'impact de votre travail sur le public, sa manière de penser, de se poser des questions...
Avant le texte et l'engagement, notre travail a changé des gens dans leur parcours musical. Comme des groupes tels que Black Sabbath, AC/DC, Rage Against The Machine, The White Stripes... ont changé notre vision de la musique. On a souvent des contacts avec des personnes qui nous disent que notre musique les remue et ça nous fait extrêmement plaisir. Après, il y a le côté engagement que l'on ressent dans le sens où nous n'avons pas un public de benêts ou de débiles. Il y a un vrai échange, avec les textes, les thématiques abordées... C'est riche.
Sur cet album, il y a d'ailleurs plusieurs thématiques fortes comme sur Les Revenants ou Frankenstein à propos des "monstres" créés par la société...
Oui, surtout sur les gouvernements qui créent ces monstres. Frankenstein est un morceau sur l'ingérence occidentale au Moyen-Orient, pour le pétrole, les ressources naturelles... Ça ne tourne pas rond et il faut conserver un œil très critique sur tout ça.
Sur l'album, vous avez fait le choix de faire un cover du titre Paranoïd de Black Sabbath. Pour quelle raison ?
Shanka (guitariste du groupe, NDLR) avait dans ses tiroirs un début de version qu'il avait créé il y a un moment. Il nous l'a proposée et on a trouvé ça terrible. Cela apportait quelque chose à la version originale. Nous avons voulu également marqué au fer rouge que Black Sabbath constitue l'ADN de No One. Ce groupe a vraiment changé l'histoire du rock.
Sur scène, le live lié à ce nouvel album a-t-il évolué au cours de la tournée ?
C'est peut-être la première fois que cela arrive dans l'histoire du groupe, mais au bout de la troisième date nous avons trouvé la setlist idéale... On peut encore bouger un peu les lignes mais nous tenons quelque chose d'exceptionnel, le public nous emmène, tient le rythme. Ca donne des concerts mémorables. Dans ce live, nous avons réussi à mettre tous les ingrédients pour prendre du plaisir sur scène.
No One Is Innocent [+ NijuKo], vendredi 25 mai 2018 à 20h au Clapier