Et aussi / De Ulrich Köhler (All., 2h) avec Hans Löw, Elena Radonicich, Michael Wittenborn...
Cadreur un brin irascible et je-m'en-foutiste, sans attaches amoureuses, Armin semble avoir prolongé son adolescence. Un lendemain de cuite, il s'éveille dans un monde où l'humanité s'est étrangement évanouie. Il va devoir vivre en étant le dernier des hommes. Mais pas des Hommes.
Largement repris depuis Defoe, le thème du naufragé a donné lieu à bien des variations insulaires, la taille de l'île variant de l'atoll à la planète — coucou, Matt Damon. Si d'ordinaire la question de la survie du malheureux survivant se pose comme la priorité cardinale, elle s'évacue ici très rapidement dès lors que l'on a intégré que ledit survivant se trouve tout sauf malheureux du sort qui lui est échu : l'éradication de ses congénères tient davantage pour ce misanthrope inavoué d'un rêve libératoire ou d'un accomplissement que d'une punition. Quant à sa subsistance, elle est assurée par les ressources désormais surabondantes d'une Terre édénique, même pas convoitées par quelque zombie ou opposant à cet idéal rousseauiste. En clair, Armin se trouve comme le prétend un dicton allemand, « Wie Gott in Frankreich », littéralement « comme Dieu en France », autrement dit pareil à un coq en pâte.
S'abstenant (à raison) de donner la moindre explication aux disparitions humaines, Ulrich Köhler surprend davantage par ce renversement narratif : la rapide résilience d'Armin, se projetant dans l'aujourd'hui et le demain plutôt que dans le monde d'avant, n'est-elle pas plus saine qu'une détresse stérile ? Ne s'agit-il pas d'une forme d'adaptation logique, darwinienne, de l'espèce à des conditions extrêmes ? D'un absolu réalisme survivaliste, In my Room s'octroie cependant de brefs clins d'œil, notamment cette ellipse séparant le flasque Armin urbain découvrant sa solitude de l'Armin aminci, aguerri à la vie des bois. Difficile de ne pas voir dans la transformation de Hans Löw et la contiguïté de ces deux plans une allusion à Seul au monde de Zemeckis...