"Martin Eden" : London, Italie

De Pietro Marcello (It.-Fr., 2h08) avec Luca Marinelli, Jessica Cressy, Carlo Cecchi…

L’Italie, dans une vague première moitié du XXe siècle. Pour avoir défendu un bourgeois dans une bagarre, le jeune marin Martin Eden est introduit dans sa famille. Fasciné par la fille de la maison, il cherche à se cultiver pour s’élever. Mais peut-on impunément quitter sa classe d’origine ?

Pietro Marcello effectue ici une transposition libre et engagée du roman de Jack London, où les interférences avec l’histoire politique transalpine trouvent un écho dans la forme même du film. L’époque composite dans laquelle les faits se déroulent évoque autant le début du XXe voyant la coagulation du mouvement prolétaire autour de la doctrine marxiste, l’entre-deux-guerre (voyant l’avénement du fascisme), les années soixante dans les bas quartiers napolitains que (de manière fugace) le temps contemporain, où des réfugiés échouent sur les plages italiennes.

Un flou volontaire faisant de Martin Eden un personnage somme et atemporel ; une figure symbolique, éternelle voix du peuple arrachée à sa condition par l’éducation et la culture, dont l’élite ne pardonne ni n’oublie la modeste extraction et que son son milieu d’origine perçoit comme un social-traître. Un être duplice également, écartelé entre ses identités, fatalement voué à la contradiction intime le poussant à une forme de fuite. Scandant son films d’images d’archives de visages et foules de toutes les époques — procédé rappelant certains dispositifs théâtraux —, Pietro Marcello accentue la dimension atemporelle de son récit : l’ascension de son héros n’en apparaît, par une ironie étrange et tragique, que plus actuelle.

Un mot pour finir sur Luca Marinelli : parfait dans l’exaltation de l’engagement politique ou la fièvre de la création lorsque son personnage écrit, le trop charismatique comédien peine hélas à dégager l’embarras des complexes de classe. Cela ne l’a pas empêché de ravir la Coupe Volpi à Venise.

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