"Et pof !" : avec Muriel Robin, on ne demande qu'à encore en rire

Muriel Robin

Zenith de Saint-Etienne Métropole

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Humour / Avec "Et pof ! ", Muriel Robin reprend ses sketchs cultes co-écrits avec Pierre Palmade il y a 30 ans, et c’est une excellente idée, tant la comédienne a marqué le monde de l’humour avec ces véritables petites pièces hilarantes et magistralement interprétées. Elle sera mercredi 19 février sur la scène du Zénith de Saint-Étienne.

Pierre Palmade, Zabou Breitman, Dany Boon, Jérôme Commandeur, Vincent Dedienne : fin septembre, lors des premières représentations de son spectacle best-of Et pof ! dans le très feutré Théâtre de la Porte Saint-Martin (Paris), Muriel Robin s’est offert des premières parties de luxe où chacune de ces stars de l’humour français rejouait l’une des partitions cultes de la patronne avant qu’elle-même n’interprète les autres. Classe. Mais, contre toute attente, c’est Isabelle Huppert qui fut sa chauffeuse de salle le soir de la toute première. Un mariage sur le papier étrange (mais pourquoi donc l’une des plus grandes figures du cinéma d’auteur français s’abaisse à jouer une partition comique – le fameux sketch La Solitude), qui dit pourtant tout de ce qu’est devenue Muriel Robin au fil des ans : une référence qui dépasse largement le monde des fans de franche rigolade, et qui lui vaut même un retour de hype bienvenu (dans les médias notamment) qu’elle ne se prive pas de savourer.

En 30 ans de carrière, Muriel Robin s’est transformée en l’une des respectables taulières de l’humour français à saynètes, si ce n’est la taulière tout court. Et ce grâce à une mécanique du rire qui se déploie autour de textes qui sont de véritables petites pièces de théâtre, avec un fil narratif solide, des rebondissements presque vaudevillesques, des personnages parfaitement dessinés… Il en faut du talent et de l’énergie façon Louis de Funès pour, seule sur le plateau, donner vie à tout un monde (une restaurant, un salon de coiffure, un chantier…) et que tout reste crédible. Et il en faut du talent et un sens du rythme précis façon Philippe Caubère pour que le rire existe et se déploie parfaitement autour de ces histoires, sans étouffer le récit mais en l’accompagnant main dans la main. Muriel Robin sait faire tout ça, et plus encore, comme elle le démontre de nouveau sur scène, à 64 ans.

« Vieille comique »

« Pierre Palmade a cette phrase pour portraiturer mes débuts que j’aime beaucoup, il dit : "Elle souffre car elle ne va jamais assez vite !" Tout était très minuté à l’époque, chorégraphié, la façon dont je parlais, je respirais… … Pas de place pour le plaisir ? Du moins, pour mon plaisir. » Voilà ce que Muriel Robin déclarait en septembre au journal Libération (on aurait aimé l’interroger également, notamment sur son rapport douloureux au one-woman-show ou sur la vision qu’elle a de sa carrière erratique, mais son emploi du temps ne lui a pas permis). Ce best-of le prouve une nouvelle fois : en plus d’être drôle, Muriel Robin est une immense comédienne aux bases solides qui peut donc passer derrière Isabelle Huppert sans souffrir de la comparaison, bien au contraire.

Une comédienne qui défend ainsi ses propres textes, co-écrits avec Pierre Palmade à la fin des années 1980, début des années 1990. Ces deux-là n’avaient sans doute pas prévu que leurs mots allaient devenir cultes, et Muriel Robin pas prévu que sa carrière allait prendre ce tournant (elle rêvait plutôt de cinéma). Pourtant ces sketches sont toujours là, et cartonnent encore sur internet – certains cumulent à plus de deux millions de vues.

L'Addition, Le Noir, La Réunion de chantier… Lorsqu’elle les reprend (elle ne les avait pas joués depuis 1996), une partie du public l’accompagne même sur les répliques phares. Sur Le Noir notamment et la fameuse tirade de la mère visiblement dérangée par la couleur de peau de son futur beau-fils – « Si ça me gêne ? Alors là pas du flou... pas du plou... pas du flouchlouplou. S’il est noir, c’est qu’il a de bonnes raisons de l’être. Mais dis-moi un petit peu, il est noir noir noir ou noir un peu... un peu blanc ? Ah, noir noir, complètement noir… Oui... On n’est pas dans la merde ! » Comme une sorte de karaoké géant. Une approche de l’art de l’humour à personnages (pas tous très recommandables, loin de là, et c’est justement ce qui fait leur intérêt) qui peut être aujourd’hui vue comme vintage, surtout depuis que la mode du stand-up autocentré est passée par là, mais qui fait toujours son effet. « Je vous remercie de vous intéresser à une vieille comique des années 1990 » lance-t-elle même pendant le show, consciente de son léger décalage avec l’air du temps.

Sketches 2.0

Une vieille comique aujourd’hui plus apaisée qui, elle l’assure, prend enfin du plaisir à monter sur scène (ce n’était pas le cas avant). Dès lors, entre les sketches du passé livrés quasiment tels quels (une obligation dans certains cas, comme celui sur la maison de retraite introuvable en voiture qui perdrait toute sa saveur si elle le modernisait avec un GPS !), elle s’autorise quelques moments plus libres d’improvisation avec le public – une panne de micro un soir où nous l’avons vue a même été propice à 10 minutes hilarantes que tous les comiques n’auraient pas été en capacité de produire.

Et elle a même glissé quelques inédits ici et là pour prouver qu’elle en a encore sous le capot : une partition tout en onomatopées pour expliquer le titre de ce best-of, ou encore une suite très mariage pour tous (en accord avec ce qu’elle est vraiment aujourd’hui – en couple avec une femme) du Noir. Une actualisation moderne qui, par miroir, rend le sketch inchangé sur le montage chaotique d’un barbecue et son personnage de domestique avec l’accent appuyé des îles plus problématique en 2020, d’autant plus avec sa nouvelle intro en mode "on ne peut plus rien dire". Un choix étrange alors que Muriel Robin est plutôt connue aujourd’hui pour ses prises de position progressistes, notamment sur la question des violences faites aux femmes. Dommage, surtout au cœur d’un best-of certes ancré dans une époque et son humour, mais pourtant si réussi. Et dommage de finir cet article de cette façon. Alors réécrivons-le une dernière fois : Muriel Robin est un monstre sacré de l’humour français avec qui on ne demande qu’à en rire encore !

Muriel Robin
Au Zénith de Saint-Étienne mercredi 19 février à 20h


Repères

1955 : Naissance à Montbrison (Loire). Sa famille s’installe ensuite à Saint-Étienne.

1977 : Après avoir vendu des chaussures dans le magasin familial, elle part pour Paris et tente de devenir comédienne. Elle intègre le prestigieux Conservatoire national supérieur d'art dramatique et a notamment pour professeur Michel Bouquet. Elle entame ensuite une petite carrière de comédienne de théâtre, mais rêve surtout de cinéma.

1988 : Elle rencontre Pierre Palmade avec qui elle commence à co-écrire des sketches. Elle joue alors ses premiers one-woman-show comme Les majorettes se cachent pour mourir, Un point, Tout m’énerve… Succès public.

1997 : Premier grand rôle au cinéma dans la suite des Visiteurs de Jean-Marie Poiré – elle reprend le personnage de Valérie Lemercier. Cette même année, elle écrit et met en scène avec Pierre Palmade le spectacle Ils s’aiment sur la vie de couple avec, dans les rôles-titres, Pierre Palmade et Michèle Laroque. Succès public.

Années 2000 : Elle annonce arrêter le one-woman-show pour se consacrer au cinéma. Mais malgré quelques rôles marquants (comme dans Marie-Line de Mehdi Charef ou le téléfilm Marie Besnard, l'empoisonneuse de Christian Faure), sa carrière ne décolle pas vraiment. Elle revient donc à la scène.

2013 : Elle se relance dans le one-woman-show avec Muriel Robin revient... tsoin tsoin, tout en continuant à apparaître au cinéma (dans Les Malheurs de Sophie de Christophe Honoré par exemple) et à la télévision.

2018 : Elle joue le rôle principal dans le téléfilm Jacqueline Sauvage : c'était lui ou moi de Yves Rénier, et s’engage dans la foulée sur la question des violences faites aux femmes.

2019 : Début de la tournée de son best-of Et pof !

2020 : Tournage, pour la télévision, de l’adaptation de certains de ses sketches cultes, avec de nombreux d’invités – Françoise Fabian, Mathilde Seignier, Vincent Dedienne, Jean Reno, Charlotte Rampling, Vanessa Paradis, Pierre Palmade, Dominique Besnehard, Pierre Arditi, François Berléand, Michèle Bernier, Élie Semoun, Jean-Pierre Foucault, Roselyne Bachelot…

pour aller plus loin

vous serez sans doute intéressé par...

Lundi 5 décembre 2022 Le premier fils, Dimitri, impétueux, sanguin et violent, est le rival de son père, entiché de la même femme que lui. Le second, Ivan, cynique intellectuel athée (...)
Mardi 26 avril 2022 De confinements en couvre-feux, la pandémie aurait presque fait oublier qu’un festival de musiques est avant tout un temps de convivialité partagée, entre amis, dans une foule de mélomanes raisonnablement...
Mardi 26 avril 2022 D’un point d’ancrage à un autre, l’artiste stéphanois porte en lui l’errance joyeuse de ceux qui savent accueillir la vie. Des sens en éveil, une gamberge qui va loin quitte à prendre son temps : portrait d’un poète en quête d’infini.  
Mardi 26 avril 2022 Comme chaque mois, le Méliès Saint-François vous convie à sa grande soirée Quiz, dédiée cette fois-ci (...)
Mardi 26 avril 2022 Voici une belle promesse que nous fait l'Opéra de Saint-Etienne. Tout le monde connaît l'histoire de Lancelot, chevalier de la Table (...)
Mardi 26 avril 2022 Fatigue passagère et moral dans les chaussettes ? La rédaction du Petit Bulletin est là pour prendre soin de ses lecteurs, avec un traitement imparable : les concerts. Et quoi de mieux que le Paroles & Musiques pour se...
Mardi 26 avril 2022 Plus on progresse, plus on se fait du mal et plus on se tue, à petit feu. Avec Bienvenue dans l’espèce humaine, Benoît (...)
Mardi 26 avril 2022 Gerard Watkins revisite le chef-d’œuvre shakespearien à travers le prisme des sixties : pantalons pattes (...)
Mardi 26 avril 2022 Hugo, 23 ans, étudiant en sciences humaines, oscille entre ses origines algériennes et françaises. Lorsque sa mère le (...)
Mercredi 13 avril 2022 Direction le restaurant de la Cité du Design pour un menu du jour digne d’une bonne brasserie avec une vue sur un jardin d’hiver étonnant.
Mercredi 6 avril 2022 Le thème : Bifurcations. La promesse : quatre mois de grande fête autour du design, à laquelle tous les Stéphanois pourraient prendre part. Les questions : la biennale Design sera-t-elle accessible à tous les publics, suffisamment...
Mercredi 6 avril 2022 Troupe amateure mais aussi qualitative que les pros, la LISA organise dès dimanche sa semaine de l’impro, avec au menu, différentes formules… Et pas mal de rigolade.
Mercredi 6 avril 2022 Envie de bamboche, d’une ambiance festive, et de gros son ? Check la liste des soirées qui arrivent, et prépare ton agenda (et ta tenue de gala) : ça sent la grosse bringue.
Mardi 29 mars 2022 Par Sibylle Brunel. Quand les petites bêtises entrainent les grosses, il est difficile de prouver que l’on peut encore répondre à la norme. A-t-on seulement (...)
Mardi 29 mars 2022 Des dernières Biennales Design stéphanoises aux salons du Conseil de l’Union Européenne à Bruxelles, la créatrice textile Jeanne Goutelle marque peu à peu de son empreinte colorée et responsable une œuvre où le réemploi de tissus industriels permet...
Mardi 29 mars 2022 Durant les quatre mois qui vont suivre, la Biennale Design de Saint-Étienne nous invite à « bifurquer ». Envisager la société telle qu’elle est, l’envisager ensuite telle que l’on aimerait qu’elle soit… Puis envisager les chemins possibles...
Mardi 29 mars 2022 Notre civilisation s’effondre, tous les scientifiques le disent. Oui mais alors… Que faire ? Vaste sujet, pourvu que l’on (...)
Mardi 29 mars 2022 Et si la décolonisation n’avait été qu’une succession d’échecs dont on voit et paie encore les pots (...)

restez informés !

entrez votre adresse mail pour vous abonner à la newsletter

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies destinés au fonctionnement du site internet. Plus d'informations sur notre politique de confidentialité. X