Les films sortis en salles le 9 novembre

À voir

★★★☆☆ Couleurs de l'incendie 

Peu après l’enterrement du patriarche Péricourt, sa fille et héritière de la banque familiale est victime d’une machination la conduisant, elle et son fils handicapé, à la ruine. Loin de se laisser abattre, elle va ourdir patiemment une vengeance contre les aigrefins responsables de son infortune…

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Prenant la suite de Dupontel pour cette première suite de Au revoir là-haut sur fond de Krach de 1929 et de montée du nazisme, Clovis Cornillac ne démérite pas — n’avait-il pas déjà signé le meilleur (çar plus sombre) opus de la série Belle et Sébastien ? — d’autant que Lemaître reste aux commandes de l’adaptation et du scénario. Assumant sans fard le classicisme somptueux et maîtrisé seyant à ce genre de fresque épique, Couleurs de l'incendie convoque l’Histoire et redonne de la vigueur à la “qualité française” abhorrée (par principe) par la Nouvelle Vague. Or, des qualités, il y en a ici à revendre dans le fond (la traversée de l’époque est vertigineuse) comme la forme : un aréopage d’interprètes mené par Léa Drucker en Mère Courage et Poelvoorde en stratège au petit pied, exécute cette partition palpitante. Du nanan, comme on disait alors.

De et avec Clovis Cornillac (Fr., 2h15) avec également Léa Drucker, Benoît Poelvoorde, Alice Isaaz…


★★★☆☆ Charlotte 

Jeune femme talentueuse issue d’une famille aisée, Charlotte Salomon (1917-1943) ambitionne d’être peintre. Mais dans l’Allemagne nazie, sa religion juive est un obstacle. Exilée près de Nice après la Nuit de Cristal, elle composera une œuvre autobiographique de plusieurs centaines de toiles — son testament.

Charlotte est à rapprocher des Secrets de mon père de Vera Belmont sorti il y a peu, dans le registre assez insolite du biopic d’animation réaliste s’intéressant à cette tragédie du réel que fut la Seconde Guerre mondiale. Tout aussi brillant dans la réalisation et l’esthétique — c’est le moins que l’on puisse offrir à une peintre —, ce portrait constitue un tour de force artistique. Même s’il édulcore certains détails (épouvantablement scabreux) de l’existence de Charlotte Salomon, il rend justice à son talent visionnaire puisque son ensemble Leben ? Oder Theater ? mêlant dessins et typographie est perçu aujourd’hui comme un prototype d’avant-garde de roman graphique. Au drame de son destin monstrueusement brisé, Éric Warin & Tahir Rana opposent une épure très ligne claire, comme pour affirmer la survivance de l’art sur la barbarie.   

De Eric Warin, Tahir Rana (Bel.-Can.-Fr., 1h32) avec les voix (v.f.) de Marion Cotillard, Romain Duris, Philippe Peythieu…


★★★☆☆ Les Lendemains de veille 

La mort soudaine de Pierrot provoque la réunion de ses potes trentenaires dans la maison du défunt, où ils vécurent en communauté dix ans plus tôt avant de s’éloigner les uns des autres pour diverses raisons. Pierrot leur a légué la demeure ; vont-ils accepter l’héritage et renouer les liens distendus ?

C’est un registre à part entière que celui du film de copains se retrouvant pour faire le point et mesurer ce qui les sépare de la photo jaunie (mais radieuse et unie) de leur jeunesse, le deuil et/ou le huis clos (d’une maison de campagne en général) catalysant constats et règlements de comptes. De Vincent, François, Paul et les autres à Mes meilleurs copains en passant par Les Copains d’abord, Peter’s Friend, Le Péril jeune ou Nos enfants chéris, la liste est longue des devanciers de Loïc Paillard dans ce genre “générationnel”.  Elle ne l’empêche pas d’apporter sa pierre intime à l’édifice, ne serait-ce que parce qu’il arrive avec un authentique groupe de copains, offrant une galerie sympathique de visages neufs, vierges de toute histoire antérieure autre que celle dont il nous propose les “archives” (tournées pour pour l’occasion). Certes, on n’échappe pas à un éventail de caractères opposés un brin stéréotypés — ne retrouve-t-on pas dans tout groupe cette distribution de profils ? — mais on note a contrario des séquences souscrivant au Test de Bechdel. The Times They Are A-Changin’…

De Loïc Paillard (Fr, . 1h25) avec Denis Eyriey, Marica Soyer, François Pouron…


À la rigueur

★★☆☆☆ Riposte féministe 

Intrigués par les groupes de “colleuses” essaimant un peu partout en France, affichant sur les murs des villes des slogans ou des affirmations féministes contre le patriarcat, le sexisme, les agressions sexuelles, la mixité et/ou le validisme, les deux réalisateurs partent à leur rencontre. Les suivent dans leurs expéditions nocturnes, en manifs et lors de discussions…

Sans mauvais jeu de mots, il s’agit moins d’un film que d’un collage d’instants militants glanés à Lyon, Le Havre, Montpellier, Paris, Montbrison, Brest, Marseille, Gignac etc. Et l’expression d’un “état des choses” dans la société à #MeToo +3 ou 4 ans. Se voulant comme un reflet de cette réalité (outre des explications sur la genèse du film données en ouverture par Marina Foïs d’une voix d’outre-tombe, il n’y a pas d’intervention des auteurs), Riposte féministe assimile en un mouvement en apparence global et uni l’ensemble des revendications féministes pourtant portées une multitude de courants intersectionnels pas forcément miscibles les uns avec les autres. En cela, ce féminisme ressemble beaucoup à la gauche post 1968, en réalité atomisée en courants lambertiste, mao-spontex, communiste, PSU etc. Les conversations filmées, émaillées de jargon/dialectique ad usum conversorum rappellent aussi les AG rouges d’antan ; d’ailleurs, certaines formules anti-flics ou antifa sont upcyclées pour coller aux pavés de 2022. Godard aurait parlé de ciné-tract.

De Marie Perennès & Simon Depardon (Fr., 1h27) documentaire avec la voix de Marina Foïs


★★☆☆☆ Trois nuits par semaine 

Intrigué puis séduit par le monde nocturnes des drag queens, un jeune photographe tombe sous le charme de l’une d’elles, Cookie Kunty, au point d’entamer une liaison suivie avec elle. Cela aura des conséquences sur son travail, son couple et son avenir…

Dans la lignée de son court métrage Un homme mon fils (2017) qui explorait déjà la question de l’identité drag et de la filiation, le premier long de Florent Gouëlou s’attache à démystifier l’intimité de ce monde de paillettes — non exempt de douleurs de tragédies personnelles — en le “raccordant“ au monde diurne auquel appartient le sage Baptiste. Si l’on saisit l’intention vaguement documentarisante du film, utilisant un candide pour nous faire découvrir l’univers drag, on ne croit pas une seconde à l’histoire sentimentale, d’autant qu’elle est traitée avec une pudibonderie digne du Code Hays. Pourquoi prendre à tout crin le prétexte d’une fiction quand on peut obtenir de la vie naturellement ? Trois nuits par semaine souffre surtout de la comparaison avec la Queer Palm Joyland (sur les écrans en décembre), abordant une thématique voisine mais à bien des égards supérieure du point de vue esthétique, dramatique et politique.

De Florent Gouëlou (Fr, 1h43) avec Pablo Pauly, Romain Eck, Hafsia Herzi…

 


On peut s’en passer

★☆☆☆☆ Les Repentis 

2000. Le politicien Juan Maria Jauregui est assassiné par un commando de l’ETA. Une dizaine d’années plus tard, l’un des membres du funeste escadron, qui a rompu ses liens avec le groupe terroriste, demande à rencontrer Maixabel Lama, veuve de Jauregui et figure de la réconciliation nationale…

Exemple typique de cinéma politico-historique à usage interne, Les Repentis ne s’embarrasse pas trop de détails contextualisant les “forces” en présence (révisez auparavant le chapitre sur l’ETA et le GAL pour ne pas être perdu), préférant sculpter la statue de Maixabel — c’est d’ailleurs le titre original du film — avec une bienveillante dévotion, au nom de la réconciliation, de la concorde, de la résilience etc. Après le biopic Yuli  (son avant-dernier film), Icíar Bollaín semble apprécier le registre du cinéma pompier plein de grands sentiments. Mouais. Pour éprouver de manière plus tangible la réalité crue du terrorisme espagnol de cette époque (c’est-à-dire sans enrobage émollient ni formatage de téléfilm) on reverra plutôt avec profit les œuvres de Jaime Rosales La Soledad (2007) et Un tir dans la tête (2008).

De Icíar Bollaín (Esp., 1h56) avec Blanca Portillo, Luis Tosar, Urko Olazabal…

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