A voir en salles la semaine du 8 février 2023

À voir

★★★☆☆  Pour la France 

Après la mort d’Aïssa, élève de Saint-Cyr, durant un "bizutage“, Ismaël son frère et sa famille bataillent pour obtenir que des honneurs lui soient rendus — la reconnaissance implicite de la culpabilité de l’institution militaire. Parallèlement, Ismaël se souvient de leur enfance et de leurs parcours divergents…

Comment faire d’un drame intime doublé d’un scandale moral un film digne et porteur de grandes ambitions cinématographiques ? Au-delà de la douleur de la perte de son frère (puisque Pour la France est une manière d’autobiographie), Rachid Hami répond par un récit posé mais non dénué de complexité dans sa construction chronologique. Trois époques s’entremêlent en effet, sur trois continents, dessinant par fragments brefs mais suffisamment explicites les trajectoires des deux frères : l’enfance algérienne durant la guerre civile (et les relations tendues avec un père en uniforme) ; un flash-back récent où Ismaël — plus orienté “débrouille” qu’études — rend visite à son Aïssa travaillant à Taïwan et enfin le long combat en France dans l’antichambre du ministère des Armées. Trois époques, trois ambiances ; trois styles, presque, participant chacun de la construction de l’absent comme de l’évolution du survivant. Ce jeu de nuances, associé au scandale que relaie le récit, a convaincu à raison les lycéens du festival de Sarlat qui ont décerné leur prix au film, Karim Leklou recevant pour sa part le prix d’interprétation.

De Rachid Hami (Fr.-Taï., 1h53) Avec Karim Leklou, Shaïn Boumedine, Lubna Azabal…


★★★☆☆  Astrakan 

Samuel, 12 ans, vient d’arriver dans une famille d’accueil rurale peu aimante qui ne fait pas mystère de l’intérêt pécuniaire que représente son placement. Peu à l’aise avec le reste de la fratrie, gêné par un oncle équivoque, il se lie à une voisine de son âge qui l'embarrasse et l’attire à la fois. Loin d’être un mauvais gamin, Samuel a juste besoin d’affection…

Attention, révélation(s) ! Si ce premier long métrage de Depesseville suit les traces du Pialat de L’Enfance nue ou du Truffaut des 400 Coups avec ce portrait-chronique d’un gosse faisant des bêtises moins par vice que pour qu’on le remarque, Astrakan s’éloigne paradoxalement du registre “social misérabiliste“ stricto sensu. Volontiers énigmatique, voire elliptique, il suggère plus qu’il ne montre ; prend le temps de filmer… le temps, de capter des non-dits éloquent et lorgne vers une sorte de fantastique onirique le rapprochant, à sa manière, du conte de tradition germanique ou scandinave — ainsi que du cinéma en découlant. Il s’agit là d’un travail de dentelière, puisqu’il le réalisme n’est pas sacrifié pour autant. Le jeune Mirko Giannini force le respect dans la peau de ce Samuel se sentant en trop (et affligé d’une haleine de poney…) ; il est bien soutenu par Bastien Bouillon et Jehnny Beth, inattendus dans leurs emplois de semi-Thénardier. À suivre.

De David Depesseville (1h44) Avec Mirko Gianinni, Jehnny Beth, Bastien Bouillon


★★★☆☆ Tant que le soleil frappe 

Paysagiste au grand cœur et fauché, Max veut transformer un terrain vague d’une ville du sud en jardin public. Manquant d’appuis politiques et financiers, il s’adresse à un architecte réputé, plutôt bienveillant à son égard. Malgré le côté chien fou de Max, celui-ci confie des missions au sein de son cabinet…

Hagard, faisant les cent pas en soliloquant comme si sa caboche avait cuit à ce fameux soleil… C’est ainsi qu’apparaît Max au début du film, forgeant l’image d’un type dévoré par sa fièvre humaniste et son enthousiasme créatif. Fougueux, généreux certes mais bien trop tendre pour frayer avec les concessions et le pragmatisme ordinaires, le personnage que construit Philippe Petit provoque une empathie immédiate chez le spectateur qui anticipe les déconvenues à venir de Max lorsqu’il commet des faux-pas par excès de candeur. Face à un Grégoire Oestermann très “cheveux-de-riches“ Swann Arnaud est parfait dans la peau de cet idéaliste égaré dans la fosse aux tigres, constatant qu’à un certain niveau l’oxygène ni la poésie n’ont plus cours. On redoute pour lui le pire, dans un suspense de thriller, jusqu’au dénouement. À noter la présence de Djibril Cissé dans son propre rôle.

De Philippe Petit (Fr., 1h25) Avec Swann Arlaud, Sarah Adler, Grégoire Oestermann…


On s’en contente

★★☆☆☆ Alibi.com 2 

Depuis qu’il a renoncé à son agence ayant pour principal vocation de couvrir des adultères, Greg a promis de ne plus mentir et s’est transformé en bonnet de nuit. Mais pour ses noces avec Flo, il lui faut remettre le couvert car il ne veut pas que sa mère (actrice X) ni son père (escroc notoire) ne ruinent la fête…

Potacherie un peu lourde — la transposition cinématographique du vaudeville de grand-papa sous une lumière fromage blanc —, le précédent opus Alibi.com valait surtout pour une séquence où le malheureux personnage campé par Medi Sadoun perdait une génitoire (on en rit au cinéma, mais dans la vraie vie, c’est hélas arrivé à un manifestant molesté par des policiers). Alibi.com 2 explore davantage le ressort du mensonge “protecteur”, c’est-à-dire ayant vocation à protéger celui ou celle à qui on travestit la vérité. Sur ce point, il reprend d’ailleurs (en version 2.0) une partie de la trame de Banzaï (1983) de Claude Zidi où deux tourtereaux se font mutuellement croire qu’ils sont au même endroit alors qu’ils doivent voyager. Autre argument en faveur du film, sa distribution baroque pour étoffer les inévitables quiproquos : il fallait penser à l’attelage Jugnot-Dombasle, à la paire Catherine Benguigui-Georges Corraface ; ou encore à la transposition marocaine Habibi.com servie par Gad Elmaleh. Pour le reste, le destroy demeure timoré (malgré le combat avec un Didier Bourdon nu) et Philippe Lacheau toujours rudimentaire dans son jeu. Bon, sinon, à quand Niki Larson 2 ?

De & avec Philippe Lacheau (Fr., 1h25) avec également Élodie Fontan, Tarek Boudali, Didier Bourdon, NAthalie Baye…

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