Les films à voir le 8 mars

À voir

★★★☆☆ Mon Crime 

Paris, les années 1930. Jeune comédienne fauchée, Madeleine Verdier est accusée d’avoir assassiné un producteur libidineux essayant d’abuser d’elle. Défendue par sa colocataire avocate, elle plaide coupable, persuadée de bénéficier de la publicité de cette affaire. Au fait, l’a-t-elle réellement tué ?

Comme Les Enfants du Paradis ou Mélo, Mon Crime paie d’emblée son tribut au théâtre (dont il est tiré) en s’ouvrant (au sens propre) sur un lever de rideau. Mais à l’inverse de Gouttes d’eau sur pierres brûlantes, 8 femmes, voire Peter von Kant, François Ozon ne limite pas ici son décor au huis clos et profite au maximum des espaces possibles pour donner de l’air à son récit, le transformant en un alliage coloré de vaudeville et de réalisme poétique à la Carné (Drôle de drame n’est pas loin, d’autant que Luchini prend des intonations à la Jouvet). Si le cinéaste insuffle à cette intrigue volontiers désuète une fraîcheur fantasque, il la fait également résonner avec notre époque en la chargeant d’un discours féministe merveilleusement relayée par son trio d’actrices : les débutantes défendent le droit à ne pas dépendre d’un homme, à vivre ensemble sans qu’on y trouve à redire ; leur aînée à poursuivre une carrière dans une société jeuniste (et patriarcale). Ozon prolonge enfin jusque dans sa distribution l’idée de l’hybridation en mariant des comédiens issus de “chapelles” très différentes mais ayant en commun d’avoir foulé les planches. Du nanan !

De François Ozon (Fr., 1h42) avec Nadia Tereszkiewicz, Rebecca Marder, Dany Boon, Isabelle Huppert…


★★★☆☆ Toi non plus tu n'as rien vu 

Avocate, mère de deux enfants, Claire est retrouvée par son époux en sang : elle a accouché seule et laissé le bébé (vivant) sur une poubelle à l’extérieur. Personne n’a vu qu’elle était enceinte de sept mois, Claire affirme l’ignorer également. Son amie et consœur Sophie va la défendre dans le procès qui suit…

Davantage qu’un film-dossier ou un film de prétoire, Toi non plus tu n'as rien vu présente dans toute sa complexité la douloureuse question du déni de grossesse… et de sa reconnaissance par la science, la justice ainsi que les proches. Le fait qu’il s’agisse ici d’une famille bien insérée socialement et non pas d’un foyer dysfonctionnel du quart-monde (habituellement décrits avec un misérabilisme charognard par la plupart des faits-divers) change de paradigme sur cette affection.

Il ne s’agit pas de la seule originalité notable dans l’approche de Béatrice Pollet, qui montre les errances de la défense en quête d’arguments s’aventurant du côté de pistes hasardeuses — l’évocation du concept semi-ésotérique des constellations familiales, par exemple. Maud Wyler, en victime multiple des silences de son corps, livre une interprétation d’autant plus troublante que son personnage incarne l’éloquence (elle est avocate) et qu’il repose sur un cas authentique.

De Béatrice Pollet (Fr., 1h33) avec Maud Wyler, Géraldine Nakache, Grégoire Colin…


★★★☆☆ Nayola

Angola, à la fin du siècle dernier et le début du XXIe. Partie en quête de son mari disparu durant la guerre civile, Nayola a rejoint le front et cherche des indices de son passage. Des années plus tard, leur fille Yara qui vit avec sa grand-mère, est devenue une chanteuse de rap dès plus corrosives vis-à-vis du régime…

Il est des guerres oubliées qui meurtrissent des pays durant des décennies sans arracher davantage qu’un entrefilet occasionnel dans la presse. Il faut que les artistes — romancier, cinéastes — s’en préoccupent pour que leur horreur rejaillissent sur l’ignorance coupable de l’Occident. Puisque ces conflits se déroulent dans des orients ou des suds lointains.

Pour nous parler de l’Angola, José Miguel Ribeiro pourrait être docte ou moralisateur ; il emprunte plutôt la voie du conte et de la poésie visuelle pour condenser un quart de siècle de conflits fratricides absurdes, et dépeindre le cadre répressif d’un pays au régime oppressant. Sa maîtrise de différentes techniques et l’usage de plusieurs textures confèrent une dimension supplémentaire au récit : comme la matérialisation d’époques successives et de points de vues variés. Beaucoup de beauté visuelle en tout cas, comme un écrin à l’histoire d’amour de Nayola pour son mari et sa fille.

De José Miguel Ribeiro (Por.-Bel.-P.-B.-Fr., avec avert., 1h23) avec les voix de Ciomara Morais, Angelo Torres…

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