Le FAR qui éclaire la danse

Wayne Mc Gregor incarne un courant chorégraphique d'une très grande technicité et d'une intense créativité. Ce génie de la danse est passé maître dans l'art d'unir les corps en mouvement et les arts numériques. FAR est fait de cette danse prodigieuse, à la fois nerveuse et fluide, à la musicalité évidente.


Wayne Mc Gregor a le vent en poupe. Comment ce jeune trublion de la danse venu d'Outre-Manche a-t-il réussi à émerger dans le paysage chorégraphique, anglais d'abord, puis international, avant de devenir —fait exceptionnel— le premier chorégraphe de danse contemporaine nommé chorégraphe résident au royal ballet de Londres et d'atteindre la consécration en se voyant décerner la suprême distinction de commandeur de l'ordre de l'empire britannique pour services rendus à la danse ? Chapeau bas, Sir ! Issu de la jeune génération britannique qui brasse aussi bien Akram Khan que Russell Maliphant, il passe tel un caméléon, d'un univers à l'autre, avec une aisance confondante. Il émergea dans les années 9O grâce à deux caractéristiques : premièrement, la qualité unique de son vocabulaire qui puise son origine dans son physique, souple, long, fin, et sa capacité à mémoriser un mouvement avec une vitesse et une précision particulières. Sa danse est à la fois nerveuse et fluide. Les combinaisons de mouvements s'enchaînent à un rythme d'enfer. Rien ne semble pouvoir ralentir ce bolide élancé. Deuxièmement, il est pionnier dans le domaine de l'utilisation exceptionnelle de la technologie au service de la danse. Son travail, en collaboration avec une gamme d'artistes non conventionnels est marqué par le goût de l'innovation, l'ardente passion pour le corps humain et le désir de créer des danses viscérales d'une grande beauté physique qui touchent puissamment et émotionnellement le public.

Du siècle des lumières à FAR

Le titre «FAR» est l'acronyme de «Flesh in the Age of Reason», livre de l'historien des sciences et de la médecine anglais Roy Porter qui montre à quel point le siècle des lumières a transformé notre vision du corps et de l'esprit. Mac Gregor refuse l'idée de leur séparation. «Je veux découvrir et comprendre comment l'esprit et le corps agissent l'un sur l'autre et communiquent entre eux.» Dans un environnement hypnotique, envoûtant d'ombre et de lumière où les éclairs de 3000 LED sur un immense panneau tracent des chemins lumineux, les dix danseurs de FAR affrontent les distorsions, la sensualité et la sensation de la sensibilité du XVIIIe siècle à la musique contemporaine et obsédante du compositeur Ben Frost. Mc Gregor est absolument authentique dans sa tentative pour intégrer une dimension intellectuelle dans le monde de la danse. Certains douteront de la possibilité d'utiliser le mouvement pour véhiculer des idées, arguant que le public recherche avant tout un divertissement, un beau spectacle, une émotion... Alors, ces danseurs, tout simplement magnifiques, nous offrent une danse à la fois nerveuse et fluide, une danse viscérale, organique, d'une grande beauté physique. Un grand coup d'adrénaline pur à couper le souffle !

FAR, dimanche 10 février 18h au Grand Théâtre Massenet


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