Indignez vous !

Marginal et provocateur mais poète exalté avant tout, le chanteur-guitariste espagnol Paco Ibanez se produira à Unieux ce vendredi 5 avril avec sous le bras son tout nouvel album. Un artiste rare à ne pas manquer. Niko Rodamel


Lorsque l'on évoque l'épique époque des Brassens ou Ferré, c'est toujours à regret que l'on parle (forcément) au passé, lâchant que « c'était mieux avant », quand les chanteurs avaient des couilles, engagés par conviction et anars dans l'âme, ne mâchant par leurs mots ou ceux empruntés à d'autres, Aragon en tête. Car ils sont désormais si rares ceux qui, sans concession aucune avec les modes et les courants, portent bien haut le verbe, le point serré sur le cœur, les tempes ruisselantes et l'index interpelant le ciel. Mais à l'heure où les textes ne sont pas toujours la priorité des auditeurs (la qualité sonore des mp3 prouve que la musique n'en est plus une non plus !), à l'instant où Stéphane Hessel rend l'âme, on est en droit de s'inquiéter de voir partir ceux qui toute leur vie durant se sont appliqués à s'indigner pour nous, nous qui gardons la tête basse par facilité ou par faiblesse, l'esprit occupé au travail ou aux prochaines vacances. Alors oui, c'est certain, Paco Ibanez pourrait sans doute passer pour un dinosaure, mais c'est peut-être aussi pour cette raison qu'il sera vraiment dommage de ne pas aller l'écouter…

Ecorché vif mais consentant

Souvent dépeint comme le chantre de la poésie espagnole ou troubadour des temps modernes, il est des chanteurs qui marquent l'Histoire, à l'image d'un certain moustachu sétois qu'il a toujours désigné comme père spirituel. Le catalan chante son Espagne, celle « de nos jours et de toujours », au travers des textes de Neruda ou Lorca avec une émotion si universelle que même ceux qui à qui l'on a imposé allemand-latin en classe de quatrième peuvent aisément comprendre ! A bientôt quatre-vingts ans, Ibanez défend sur scène son tout nouvel album, Paco Ibanez canta a los poetas latino américanos. De nouveaux auteurs latino-américains sont venus étoffer le répertoire : la poétesse argentine Alfonsina Storni, le Péruvien César Vallejo, le Cubain Nicolas Guillen ou le Nicaraguayen Ruben Dario. Internationaliste engagé, Paco Ibanez s'amuse lui-même de parler «basque par l'enfance, castillan par l'école, français par reconnaissance, italien par goût et catalan par amitié». Applaudi dans le monde entier depuis plusieurs décennies, l'artiste a toujours refusé les médailles et les prix qu'on lui tendait, hanté par l'idée supérieure de la liberté. Une espèce en voie de disparition.

Paco Ibanez, Le Quarto, 5 rue Jean Jaurès à Unieux
Vendredi 5 avril 2013, 20h30


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