Manon, Manon...

Le catalogue des œuvres de Jules Massenet regorge de pépites reléguées à la confidentialité des alcôves musicologiques. Dans «Le Portrait de Manon», le maître lève le voile sur ses émois de jeune homme, et la cinquantaine venue, s'offre une seconde chance de maîtriser son sujet. Un seul acte et une heure pour tout dire, sans redites... Alain Koenig


Affranchissons le lecteur d'un doute : Le Portrait de Manon n'est pas «Manon, le Retour». La genèse de cet «opéra-comique» de Massenet est intrinsèquement liée à la création de l'un de ses grands chefs-d'oeuvre. En 1894, Sibyl Sanderson, soprano fétiche du maître, pour qui le rôle de Thaïs devait être créé à l'Opéra-Comique, fit monter les enchères entre la Salle Favart et l'Opéra... C'est au final l'Opéra qui s'octroya les services de la diva, l'Opéra-Comique devant se contenter de ce que d'aucuns pourraient considérer à tort, comme une bluette de Massenet. Car ni l'intrigue, ni la musique ne sont une redondance de leur célèbre aïeule. Chaperon aigri du jeune vicomte Jean, qu'il essaie de protéger contre ses sentiments pour la belle Aurore, le Chevalier des Grieux vieillissant, n'en finit plus de ruminer son aversion du sentiment amoureux. Il recouvre l'usage de son «coeur» par le biais d'un subterfuge, rappelant à ses yeux emplis de tristesse, les traits du visage de Manon. Dans le cadre de son projet pédagogique, Sophie Laflaquière confie : "C'est une histoire d'amour dans laquelle chacun reconnaîtra un peu de sa vie". 

Un projet d'élèves

L'ouvrage, présenté au public le 26 mars, rassemblera l'orchestre symphonique et les chanteurs des classes du Conservatoire Massenet (Chloé Buchet, Grigor Kiarakosyan, Sophie Laflaquière), Julien Dumarcey (baryton) et les choeurs de la faculté de musicologie de l'Université Jean Monnet. Lourde tâche pour des élèves que d'incarner vocalement et esthétiquement des personnages psychologiquement matures et complexes ! C'est à Gautier Marchado, élève de la classe d'art dramatique, qu'incombera la tâche de mettre en scène son premier opéra, avec son cortège d'exigences endémiques. Eric Varion, spécialiste des grandes boutiques, éclairera le sens du terme «pratiques collectives» et, à la tête du vaisseau, pratiquera la maïeutique musicale avec les aspirants de tout bord... Enfin, il est utile de préciser qu'un important travail pédagogique est effectué en amont auprès des classes d'hypokhâgne, de l'Ecole des Mines de Saint-Etienne et de différents établissements scolaires de la région.

Le Portrait de Manon, le 26 mars à 20h30, Centre Saint-Augustin, Saint-Etienne


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