Quand un plat réunit tous les bons ingrédients, il y a fort à penser qu'il sera délicieux… Une femme de Philippe Minyana, mise en scène par Martial Di Fonzo Bo en est une savoureuse confirmation. Florence Barnola
Voici une superbe distribution ! En tête Catherine Hiegel, qui s'est fait virer en 2009 de la Comédie Française, preuve qu'elle n'est pas inintéressante. Sa voix, grave, rocailleuse parfois, trahit son expérience du plateau et de la vie. Elle fait partie, avec Martial Di Fonzo Bo, de la « petite communauté » de Philippe Minyana. Pour eux, il a écrit Une Femme, jouée par l'une, mise en scène par l'autre. Le personnage central de cette histoire est Elisabeth. Malade, restant dans une chambre, ses souvenirs ressurgissent. Tandis qu'elle nous emmène dans les méandres de son passé, il s'en passe de drôles à l'extérieur, dans la forêt. Assez flippante par certains côtés car il y a tout lieu de penser que c'est l'apocalypse, au dessus de la rivière passent des boules de feu. A la seule lecture, cela peut paraître obscur, voire plombant. Erreur ! Rien qui ne vous donnera des idées suicidaires à la sortie. Bon, dire que c'est un remake de la Cage aux folles serait hardi mais le burlesque pointe son nez tout de même dans cette curieuse pièce. Et puis Martial Di Fonzo Bo ! Acteur de génie (il a joué avec Langhoff, Régy, Py, Bondy, Rodrigo Garcia, Christophe Honoré…) et metteur en scène inventif, prolixe (plus de 22 mises en scène). Comme à chacun de ses spectacles, il a l'art de mettre une fantaisie et une chaleur folle sur scène. Musique, chant… et la prise de distance si indispensable au jeu que nous en oublions parfois que nous sommes en France. Le fait est que le metteur en scène soit argentin y est sans doute pour quelque chose.
C'est un alchimiste, faisant poésie du sordide chagrin. Et c'est drôle aussi. Les acteurs sont heureux, on le voit, ce qui a une incidence sur l'auditoire, indubitablement. A côté de la grande dame de théâtre, on trouve la sœur de Lio, Helena Noguerra, en fidèle et amicale veilleuse. Notons aussi que les trois autres comédiens font également une très belle prestation. Nous avons d'ailleurs pu voir en début d'année Raoul Fernandez dans Par les Villages à la Comédie. Ici Minyana, par le biais de son écriture, nous fait ouïr « le bruit que fait le monde ». « Son théâtre » raconte Marcial Di Fonzo Bo « est un théâtre de l'existence dont le projet est bien de raconter qui nous sommes ». Fraîchement créé à la Colline où il se joue jusqu'au 17 avril, le spectacle s'arrête pour notre plus grand bonheur en terre stéphanoise en cette fin de mois. Ne le manquons pas !
Une Femme mis en scène par Martial Di Fonzo Bo au Théâtre Jean Dasté, à la Comédie de Saint-Etienne. Du mercredi 23 au vendredi 25 avril à 20 h