Main basse sur la ville


Les Italiens ont Francesco Rosi ; nous avons Yves Boisset. On pourra discuter du fossé qualitatif entre les deux cinéastes, mais force est de constater qu'à peu près au même moment, ils ont creusé un sillon similaire : celui de la fiction politique engagée, virulente et portée sur la dénonce. Chez Boisset, les années 70 sont un terreau assez fertile, donnant naissance à quelques films populaires qui tiennent plutôt bien le coup aujourd'hui : R.A.S., Allonzenfants, Dupont Lajoie et Le Juge Fayard dit le shériff. Ce dernier bénéficie d'un atout choc : la présence de Patrick Dewaere dans le rôle-titre. Comme dans tous les films dans lesquels il a joué, Dewaere tire l'ensemble vers le haut — autre exemple : Mille milliards de dollars, où il fait oublier la réalisation télévisuelle d'Henri Verneuil.

Le Juge Fayard dit le shériff le montre ainsi en preux juge d'instruction s'élevant contre la corruption politico-financière au péril de sa vie, dans une France giscardienne qui prend encore ses aises avec la séparation des pouvoirs. Particularité du film : il a été tourné à Saint-Étienne, et devient donc un document sur la ville. C'est aussi une sorte de Madeleine de Proust pour les Stéphanois, dont beaucoup ont participé comme silhouettes ou figurants au tournage. Une raison de plus pour redécouvrir le film, qui plus est dans une version restaurée numériquement et présentée — le jeudi 10 avril à 19h30 au Méliès et le vendredi 11 avril à 20h30 au Colisée de Saint-Galmier — par le réalisateur lui-même.

Christophe Chabert

Le Juge Fayard dit le shériff
Au Méliès, du 2 au 20 avril


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