Entre «soies» et «soi»

Jadis creuset de deux traditions musicales coexistantes, l'une populaire, minière et décomplexée, l'autre blason d'une bourgeoisie «armo-rubanière» souffrant d'un strabisme lyonnais, Saint-Étienne a développé une identité forte, foisonnante, déconcertant le mélomane le plus endurci. Quid d'aujourd'hui ? Alain Koenig


A la différence d'autres villes minières européennes, Saint-Étienne nommée jeune préfecture en 1856, cumule toutes les fonctions d'une métropole. Quand la mine ferme au XXe siècle, ici, on reclasse, on réoriente, on anticipe une retraite, alors que les mineurs du bouleversant film «Les Virtuoses» quittent leur bourgade galloise, sans alternative ni projet. Le nombre impressionnant d'orchestres d'harmonie toujours en activité, atteste que l'exode n'a pas eu lieu, et pérennise la tradition de «l'amour du travail bien fait», si cher aux corps de métier manuels. Faut-il alors s'étonner du nombre, outre les structures institutionnelles (Orchestre Symphonique Saint-Etienne-Loire, Opéra-Théâtre, Chœur Lyrique...), d'associations symphoniques dans le département, dont une professionnelle ? Que dire des chœurs amateurs, dont la liste pléthorique donne le vertige pour une agglomération de cette taille ? De la chorale de paroisse, aux chœurs lyriques, mixtes ou pas, jeunes ou vieux, tous les répertoires se côtoient, de Jean-Sébastien Bach à Céline Dion, dans un joyeux et parfois, même concert.

Que la strette commence !
Il n'est pas si loin le temps où une carrière de chanteur d'opéra pouvait s'achever à Saint-Étienne... Dans les archives, l'on trouve des témoignages-irrésistibles- de «bons bourgeois» incommodés par l'odeur du saucisson à l'ail pendant une représentation du Roi d'Ys, preuve de la mixité et de la popularité de l'art lyrique à cette époque... Cette ville est décidément atypique, berceau des meilleurs musiciens, et de la convivialité des espaces qui lui sont dédiés. C'est tout cela Saint-Etienne, et seuls les «bazuts» passeront à côté !


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