Folie romantique de l'âme russe

Giselle est l'archétype du ballet classique, la référence du ballet romantique. Le Yacobson Ballet, compagnie russe créée en 1969 par Léonid Yacobson et dirigée depuis 2011 par Andrian Fadeev, se frotte à ce mythe afin de présenter une version de qualité. Monique Bonnefond


La compagnie Yacobson Ballet présente une vraie particularité. C'est la seule compagnie nationale indépendante de Russie - non affiliée à un Opéra - et de ce fait, elle devient très vite un événement dans le paysage du ballet russe. Elle est en passe aujourd'hui d'atteindre une renommée internationale, portée par soixante-quinze danseurs à la technique éblouissante, aux très beaux ports de corps et des solistes sublimes de talent. Son directeur, Andrian Fadeev, nous donne une version classique de Giselle, «l'apothéose du ballet romantique» selon Serge Lifar. Il réunit tous les éléments du courant esthétique et philosophique qui parcourt la première moitié du XIXe siècle : le rêve et le fantastique envahissent l'acte II par opposition au réalisme de l'acte I. Cependant, tout en respectant le ballet traditionnel, avec les pas de danse tels qu'ils ont été chorégraphiés à la création par Jean Coralli, Jules Perrot et Marius Petipa, dans cette Giselle, tout est neuf : les décors, les costumes.

Giselle avec deux ailes
Tout au long du ballet, elle vole, cette Giselle. Qu'elle soit la jeune paysanne de quinze ans, heureuse, amoureuse du bel Albrecht dont elle ignore la véritable identité qui lui sera révélée par Hilarion, le garde-chasse jaloux, responsable de la folie dans laquelle elle tombera à la fin de l'acte I. Ou qu'elle soit une Wili qui ira, dans le second acte, vêtue d'une robe clair de lune, au bal de minuit, dans un univers fantasmagorique où une brume bleuâtre baigne les intervalles des arbres de la forêt. Elle se joindra aux Wilis qui entraînent les voyageurs dans l'eau glaciale du lac et poussée par Myrtha, la reine des Wilis, elle cèdera au vertige de la danse, bondissante, tourbillonnante, suivie par Albrecht... Mais devenue un esprit surnaturel, elle pardonnera et sauvera la vie de son prince. L'amour comme l'art transcende la mort. Giselle est considérée comme le ballet romantique le plus achevé. L'innocence, l'impulsivité, la duplicité, le mensonge, la puissance et la pauvreté, la peur et la domination, le regret et la jalousie y sont représentés. L'auteur de la musique, M. Adolphe Adam peut revendiquer lui aussi une bonne part dans le succès. Les rayons bleus du clair de lune glissent sur les notes argentées de sa musique et sur les eaux transparentes du lac.

Giselle, vendredi 23 janvier à 20h et samedi 24 janvier à 18h, Opéra-Théâtre de Saint-Étienne


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