Après l'exil, mineurs ici.

Avec une exposition photographique et l'édition d'un livre, le Nouveau Couriot met à l'honneur le travail de Farida Hamak et à travers lui, tout un pan de notre identité locale. Niko Rodamel


Journaliste et photographe, Farida Hamak a sillonné le territoire stéphanois pendant près d'un an et demi à la recherche de mineurs et de métallurgistes de toutes origines confondues, pour les interviewer et les photographier en famille. Il s'agit ici de mettre dans la lumière des populations qui sont venues parfois de loin, du Maghreb, d'Espagne ou d'Italie, pour travailler ici. Au fil de la longue Galerie des douches du Grand Lavabo qui jouxte la salle des pendus, on peut observer d'un côté une quarantaine de portraits «faits à la maison», de la chambre au salon. Entre les ouvertures sur le mur d'en face, une quinzaine de plus grands formats proposent une visite assez graphique de paysages industriels où le mélange du métal, du minerai et du végétal semble tisser des tableaux évoquant des souvenirs intemporels.

Parole d'auteur et témoignages

Farida Hamak s'explique. «A travers ce travail pour lequel j'ai eu la chance d'avoir carte blanche, j'ai voulu partager une histoire familiale qui n'est pas mais seulement la mienne mais aussi celle de beaucoup de gens qui comme moi ont connu l'exil. Comme je n'habite la région que depuis trois ans, j'ai dû faire beaucoup de recherches en amont, j'ai beaucoup lu et beaucoup roulé ! Avant même de rencontrer les gens, j'ai naturellement commencé par me familiariser avec les paysages de Saint-Étienne et des communes voisines. Il n'est jamais évident de débarquer comme ça dans une famille pour la photographier. On a d'abord beaucoup discuté, les textes ont généralement précédé les images. Je peux dire que ce projet est un vrai travail collectif ! Je suis d'ailleurs assez fière car les photos vont voyager tout au long de l'année 2015 dans les territoires que j'ai parcourus pour ce projet : l'exposition se prolongera ainsi à la Ricamarie, au Chambon Feugerolles, à Firminy et à Saint-Chamond.» Au fil de ses rencontres, Farida a pu recueillir des témoignages justes et touchants, qui viennent compléter les photos dans le livre Mineurs, ici. «On vivait à huit dans un deux-pièces. C'est vrai qu'on était tout le temps dehors. Tout le monde se connaissait, il y avait une certaine fraternité, je ne me rappelle pas avoir connu de discrimination. Les ouvriers étaient fiers de faire un travail manuel. Aujourd'hui, les jeunes sont en bas des barres d'immeubles. En une génération, ça s'est perdu. Parce qu'autrefois il y avait des rêves…»

Mineurs, ici., jusqu'au samedi 28 février 2015, Puits Couriot / Parc-Musée de la mine à Saint-Etienne


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Cinéma sous les bombes