Lamaizière pour toujours

Dans la liste des grands bâtisseurs qu'a compté la cité stéphanoise, Léon et son fils Marcel Lamaizière conservent une belle place. Auteurs de plus de cent-vingt projets de construction et d'aménagement à Saint-Étienne, ils constituent des bâtisseurs hors pair qui ont marqué le tournant du vingtième siècle en terres stéphanoises et au-delà.


Quelques noms de bâtisseurs et d'architectes ont marqué durablement l'histoire de Saint-Étienne. Parallèlement aux Dalgabio (et notamment Pierre-Antoine à qui l'on doit le plan du centre-ville orienté Nord-Sud autour de la Grand'Rue) les Lamaizière, père et fils, sont une "dynastie" architecturale ayant façonné Saint-Étienne et ses aménagements entre 1880 (année d'ouverture du cabinet par Léon) et 1923 (année du décès de Marcel, quand l'agence employait encore une quinzaine de personnes). Auteurs de cent-vingt constructions de tout type sur le territoire stéphanois, Pierre-Adrien dit Léon et Marcel, son fils, représentent un pan de l'histoire de notre région. Immeubles emblématiques (Loire Républicaine sur la place Jean Jaurès, Hôtel Colcombet sis rue du Lieutenant Morin, immeuble Cote sis au 2, rue de la République), édifices industriels (Manufrance sur le Cours Fauriel, Usine Brossy sise rue Gutenberg), bâtiments publics (hôpital Bellevue, Bourse du Travail), logements sociaux, commerces, ... véritables «architectes de famille» comme l'on a un «médecin de famille», les Lamaizière touchaient à tous les types de constructions. La raison de cette omniprésence sur le tissu urbain stéphanois est plutôt à aller chercher du côté du caractère de Léon, le père.

«Originaire de Saône-et-Loire, Léon Lamaizière a connu une ascension sociale spectaculaire, explique Cendrine Sanquer, responsable de Ville d'art et d'histoire à Saint-Étienne. Il était bon gestionnaire et avait de l'entregent. Il savait orchestrer ses réseaux, ce qui lui a permis de s'imposer dans différents milieux. Il travaillait ainsi pour les particuliers, la ville, les houillières, les hospices... jusqu'à créer des logements "économiques" que l'on appellerait aujourd'hui "sociaux" notamment au 14-16 de la rue Clovis Hugues. Son fils, Marcel, était quant à lui, un peu plus artiste que son père, un peu plus réservé.»

Des visionnaires, au-delà de Saint-Étienne

Prolifiques, les Lamaizière n'ont pas laissé leur empreinte qu'en terres ligériennes. Proches de Nicolas Canlorbe (dit Ariste), président de la Société française des Nouvelles Galeries réunies, Léon et Marcel vont ainsi contribuer au développement provincial de l'enseigne avec un travail sur plus de trente magasins à travers la France. Les Lamaizière ont porté leur marque sur le développement du modèle de grand magasin à cette époque. Forgeant ainsi des lieux de vies qui ont compté et comptent toujours autant sur un plan social et urbanistique. Tournés vers l'avenir, les Lamaizière avaient une appétance pour les nouvelles technologies de l'époque, participant ainsi au mouvement architectural qui forgera par la suite l'art moderne. Avec la solidité de leur architecture démontrée encore aujourd'hui et caractérisée par son côté ouvragé mais exemptée de toute exubérance, les constructions de la dynastie Lamaizière sont incontournables et méritent de lever les yeux sur les façades de la ville pour mieux en apprécier la qualité et le travail qui ont forgé l'histoire et ainsi l'identité de la capitale stéphanoise pour longtemps. NB

 


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Insomniaque avril 2015