F. Hadji-Lazaro : "Un optimiste est un naïf abruti"

Depuis plus de trente ans, François Hadji-Lazaro et son groupe Pigalle impose une marque forte et singulière sur le rock et la chanson réaliste. Icône populaire dans le vrai sens du terme, FHL est un personnage hors norme, avec son franc-parler et sa capacité à jouer un nombre grandissant d'instruments de musique. Rencontre avec ce passionné qui se produira une nouvelle fois à la Rue des Artistes le 21 juin avec Pigalle.


Pigalle a toujours refusé le cloisonnement et les étiquettes. Est-ce la raison de la présence du groupe depuis si longtemps ?
François Hadji-Lazaro : Oui, c'est sans doute une des raisons principales. Il est certain que les cases se démodent et même si elle permettent d'être vite reconnu, l'oubli est tout aussi rapide. Bousculer les étiquettes est un pari dangereux mais dans le cas de Pigalle cela a été efficace et a permis que l'on joue ou enregistre toutes sortes de choses, pour toutes sortes d'oreilles.

Utilisez-vous autant d'instruments sur scène que sur vos enregistrements studio ?
Non, beaucoup plus en studio. Sur scène j'en ai une douzaine, mais je peux en jouer, maintenant presque une trentaine : cordes, vents, claviers, soufflets, ... Certains sont imposants et difficiles à transporter. C'est un besoin “maladif” de diversité et d'amour de l'objet.

Vous êtes presque l'homme-orchestre de Pigalle. Comment procédez-vous pour créer et enregistrer ?
Il y'a les textes, les mélodies et les ambiances/arrangements. Comme je pratique les trois, il n'y a pas de règle et ça peut changer à chaque morceaux. L'informatique musicale que j'emploie depuis 1989, me permet d'essayer plus facilement toutes les sortes d'instruments et de créer, de fait, des ambiances musicales en amont. Donc chaque morceau a eu sa démarche spécifique.

Il y a toujours un peu de mélancolie dans vos compositions voire de pessimisme. Est-ce que c'est une marque de fabrique ?
Non, c'est juste que pour moi, un optimiste est un naïf abruti, il suffit d'ouvrir les yeux pour se rendre compte qu'on vit dans un monde “caca” et que je ne vois pas pourquoi je le nierais même s'il y a toujours des petites notes humoristiques deci-delà dans mes textes comme dans la vie quotidienne. C'est donc de la “fabrique” logique.

Est-ce que vous avez la sensation que votre travail est reconnu à sa juste valeur après plus de 30 ans de scène et d'albums ?
Les deux avis sont valables. Peu d'artistes peuvent se prévaloir de durer aussi longtemps et de toucher des publics aussi divers et ce, sans compromis, ni opportunisme. Mais je peux aussi déplorer de n'être pas tout à fait reconnu en tant que vrai artiste “populaire” et arriver à bouffer vraiment le terrain à la varietoche insipide.

Quand je ne joue pas, je dessine tout le temps et même pour moi, faire la cuisine est une créativité quotidienne.

Que pensez-vous de la "nouvelle scène de musique française" et de son évolution ?
Il y a une contradiction entre la possiblité actuelle de découvrir tous les musiques du monde et que cela ne débouche que sur des cases et des styles plus que “repertoriés “ et peu innovants. Cela ne concerne pas seulement les p'tits jeunes mais aussi les radios, distributeurs, pubs, ... Trop de copié/collé.

Qu'est-ce qui vous pousse encore à créer ?
C'est un besoin de naissance, quand je ne joue pas, je dessine tout le temps et même pour moi, faire la cuisine est une créativité quotidienne, sans parler des histoires débiles que je me raconte en permanence dans la tête. Sinon, je suis occupé à préparer un nouveau livre/disque pour enfants qui sortira en Avril 2016.

Pigalle + Raffu + Anissa Bensalah, dimanche 21 juin, Parc Nelson Mandela à Saint-Chamond


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