Esthète quartet

Le jeune trompettiste David Enhco viendra défendre sur la scène du Fil «Layers», second album d'un quartet inspiré et captivant. Un jazz résolument en suspension. Niko Rodamel


Enfant de la balle (la dynastie Casadesus compte depuis cinq générations nombre de musiciens, compositeurs, poètes, comédiens, peintres ou chefs d'orchestre), David Enhco a bénéficié d'une double formation classique et jazz lui permettant d'être très tôt invité à jouer à travers le monde dans des formations allant du duo au big-band. Véritable touche-à-tout, il est aussi le créateur de projets musicaux originaux comme The Amazing Keystone Big Band, il enregistre une musique de film pour la photographe Sarah Moon et co-écrit le spectacle Les Diables Verts avec la danseuse Marie-Claude Pietragalla. David monte en 2012 son propre quartet pour enfin mettre en lumière ses talents de compositeur. «Je me suis entouré de trois amis. Roberto Negro au piano, Florent Nisse à la contrebasse et Gautier Garrigue à la batterie. Trois musiciens exceptionnels. Leurs parcours hors des sentiers battus leur permettent de s'enrichir mutuellement et de créer une musique en équilibre.» A peine trentenaire mais avec déjà deux albums à son actif en tant que leader, Enhco s'inscrit dans cette génération de jeunes musiciens dont l'inspiration est d'une étonnante maturité, osant prendre des directions diverses en toute liberté mais toujours avec intelligence et cohésion.

En apesanteur

La trompette de David Enhco est d'une remarquable fluidité et le sens de l'espace est des plus appréciables mais, la virtuosité instrumentale demeure ici au service du lyrisme et de l'émotion. David Enhco pense sa musique comme un conte initiatique. Le premier opus, La Horde, baignait dans une douce quiétude, une mélancolie contemplative accouchant d'un univers chargé d'une grande puissance poétique. Le tout nouvel album, Layers, est davantage une création collective où les quatre individualités du quartet se fondent en une entité nouvelle, faite d'apparentes oppositions, d'influences et de styles différents, créant un objet musical original et en mouvement. Exposées comme des séquences liées entre elles par de courts interludes, les compositions nous immergent dans une atmosphère cinématographique, à la fois complexe et exigeante. Certes le quartet s'appuie sur une écriture tirée au cordeau mais pour autant les musiciens s'avèrent tout aussi capables de lâcher prise pour laisser le champ libre à l'improvisation. Ce qui nous promet à coup sûr un live entre ciel et terre, à la limite de l'apesanteur.

David Enhco Quartet, dimanche 31 mai à 18h00, Le Fil à Saint-Étienne


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