Dédale A45

Grégory Bonnefont, auteur, comédien et metteur en scène et Niko Rodamel, photographe et journaliste, ont mêlé leurs arts pour l'exposition Avant l'A45 ? Laissez parler les terres. En trois temps, cette « introspection territoriale » questionne le projet de l'A45 d'un point de vue neutre, entre détracteurs et défenseurs.


« J'ai grandi avec le projet de l'A45 sur mes terres. Très jeune, je me souviens du géomètre foulant le pré de mes grands-parents pour tracer l'autoroute », raconte Grégory Bonnefont. Cet homme de théâtre a eu l'idée de ce projet en triptyque, composé d'une exposition photographique réalisée avec le photographe Niko Rodamel, d'une pièce de théâtre et d'un débat. Au centre de ces créations, le projet très controversé de construction de l'autoroute A45, entre la Fouillouse et Brignais, pour désenclaver l'A47, notamment au niveau de Givors. Depuis plusieurs générations, ce nouveau tracé plane au-dessus de la vie des Ligériens et Rhodaniens, telle une épée de Damoclès pour certains, ou une baguette magique pour d'autres… 

Accomplissement d'un long travail d'une année, l'exposition, déjà présentée à la Buire jusqu'au 16 janvier, constitue au départ une réflexion citoyenne. Les deux hommes, en sillonnant monts, vallées et autoroutes, ont pris conscience du caractère sensible et fondamentalement politique de ce projet. En dix-huit tirages, l'exposition retrace avec brio les problématiques inhérentes à ce nouvel axe routier et à la diversité des opinions des nombreuses personnes rencontrées. Riverains, maires, collectifs ainsiq qu'un économiste ont enrichi de leurs points de vue le parcours des deux artistes. « Ils avancent tous des arguments intéressants. C'est assez déstabilisant » affirme Niko Rodamel. En fin d'exposition, un panneau en noir et blanc regroupe les moments forts de ces rencontres. Plusieurs clichés de mains, d'une grande expressivité, ornent le montage, tout en lui conférant une puissance certaine. 

L'art au service de la réflexion

Les paysages urbains, la plupart du temps présentés sous forme de montages, côtoient les paisibles panoramas des coteaux du Jarez, en sursis face au supposé tracé de l'A45. La nature occupe une place essentielle dans cette réflexion, que l'on pourrait pourtant, à première vue, qualifier d'urbaine. Le piquet intrusif des géomètres et les photos de la ferme des grands-parents de Grégory rappellent également le poids que fait peser ce projet sur la vie de nombreuses familles.

Au travers de clichés pertinents, Niko Rodamel et Grégory Bonnefont mènent à une réflexion profonde sur la nécessité d'un tel changement et les bouleversements qu'il pourrait provoquer.  Au bord de l'A47, un graffiti, immortalisé par le photographe, essaie lui-aussi, tant bien que mal, d'interpeller les automobilistes en perpétuel mouvement, en incitant au questionnement : « Le pognon fait de vous un peuple sans passion ». 

Marlène Thomas

Avant l'A45 ? Laissez parler les terres, jusqu'au 16 janvier 2016 à la Buire, l'Horme. Vernissage et sortie de résidence de la forme théâtrale, le 9 janvier à 19h30.


<< article précédent
La Montagne magique