"Le Lendemain" : un film intense de Magnus von Horn

Un an tout juste après sa présentation à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, ce premier film radical sort enfin sur les écrans. À découvrir sans procrastiner.


Dans Le Lendemain, c'est chaque jour d'après qui est une épreuve pour John, un ado dégingandé et mutique. Réintégrant sa famille au terme de deux ans de réclusion, il doit subir opprobre, hostilité, humiliations infligés par une communauté résolue à lui faire payer un crime mystérieux. La force de ce film intense réside dans sa frontalité brutale, son absence d'excipient psychologique et d'explication superflue : chaque séquence révèle une écaille du contexte, une bribe de l'histoire écoulée. Et nous place dans l'inconfortable position de témoin impassible devant les exactions commises contre John, devant imaginer parfois ce qui se trame dans le hors-champ — puisque la caméra ne bouge guère et que les plans s'installent dans la durée.

Magnus von Horn rend l'inconfort perceptible, et met le spectateur franchement mal à l'aise lorsque progressivement, celui-ci distingue les tenants et les aboutissants de ”l'affaire” dont le fantôme empoisonne tout le monde. Et le perturbe davantage lorsqu'il cerne le portrait sans angélisme de John, dont la colère couve encore sous le calme apparent. Rarement l'équation entre nécessité d'une seconde chance pour le coupable qui a purgé sa peine vis-à-vis de la société et l'impossibilité de pardonner pour ceux qui ont éprouvé la douleur n'aura été aussi bien formulée, sans jamais poser l'abjecte question de la peine de mort. Il y a beaucoup à apprendre de cette narration qui, à l'instar d'un certain cinéma roumain, obtient par l'économie et la composition raisonnée des résultats démultipliés.

Un film de Magnus von Horn (Pol/Suè/Fr, 1h41) avec Ulrik Munther, Mats Blomgren, Alexander Nordgren…


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