Voyage à Lilliput

Mauve Farris et Chloé Serre présentent Rien ne change de forme comme les nuages si ce n'est les rochers, en ouverture d'une nouvelle session de six expositions à découvrir à la Serre au fil de l'année 2017.


Les deux plasticiennes (toutes deux diplômées d'Ecole Supérieure d'Art et Design de Saint-Étienne) ont installé un petit monde chimérique à l'ombre des plantes qui font ordinairement partie intégrante du lieu. Sous la gigantesque canopée végétale, s'organise un inquiétant univers minéral qui lui-même semble abriter une civilisation aux abois. Tout se joue au sol, quasiment rien sur les murs. Au gré de la visite, on déambule au coeur d'un paysage fait d'étranges massifs montagneux, un défilé de roches abruptes issu d'une géographie imaginaire où se joue le drame d'une société lilliputienne en lutte contre des forces invisibles que la matière enfouit sournoisement. Succession de scènes où l'on découvre de petits corps noirs entassés, empalés, découpés, où l'on croise également des monstres aquatiques cyclopéens. Ici une fontaine sertie de pièces de monnaie. Là une caverne ornée d'ossements blancs, dont l'intérieur est tapissé d'un tissu rouge, abritant un écran sur lequel une vidéo montre en boucle et en négatif un chien qui se déhanche frénétiquement sur un jouet. Plus loin un pendu, au cœur d'une grotte surplombant une poignée d'immeubles ensablés… Autant de temples maudits, de lieux de dévotion aveugle et de scènes sacrificielles qu'accompagne une bande-son nourrie de cris d'effroi.

Mégalithes

Un cheminement de petites bougies à LED nous invite à gagner l'étage supérieur pour la suite de l'exposition jusqu'à rejoindre un espace de la Serre rarement utilisé, où se dresse un ensemble de mégalithes en carton plongés dans une demie obscurité, tagués de dates et de messages divers, Julien je t'aime plus que tout, mdr, Nike ta mère, jte kiffe, la Ric la vie, batarde... Au final le propos se brouille et l'on perd un peu le sens de l'ensemble. Même les titres grossièrement scotchés au sol semblent vouloir nous mener sur des pistes divergentes : La poisseuse, Le tordu, L'oreille de Denys, L'îlot du tyran, Le bras droit, On a pas l'air virils, Arachnides… Décontenancés (pour ne pas dire déçus) par cette première exposition, nous attendons vivement les prochaines, dans l'impatience de découvrir notamment les Végétations de Jérôme Dussuchalle (en mai) ou les mathématiques sentimentales du quadrilatère Gaëlle Choisne, David Posth-Kolher, Octave Rimbert-Rivière et Pablo Réol (en octobre).

Rien ne change de forme comme les nuages si ce n'est les rochers, de Mauve Farris et Chloé Serre, jusqu'au 25 février à la Serre


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