20 Syl : « Le nom AllttA a été un déclic visuel »

Après Hocus Pocus et C2C, le Dj et beatmaker nantais 20Syl s'est lancé dans un nouveau projet electro/hip-hop au nom très spirituel  : AllttA. Aux côtés de Mr J. Medeiros (du groupe The Procutions), ils ont dévoilé The Upper Hand, un opus de belle facture qui secoue les têtes et fait vibrer les mollets. Rencontre.


Est-ce que vous pouvez nous expliquer la rencontre avec Mr J. Medeiros ?
C'était en 2004 ou 2005, lorsqu'on était en studio avec Hocus Pocus en train d'enregistrer l'album 73 Touches. On a vu The Procussions, le groupe de Jason en concert et nous avons eu un vrai coup de cœur. Nous les avons invités le temps d'une journée "off" sur leur tournée à nous rejoindre en studio et dans notre émission de radio. La connexion s'est faite comme ça et depuis nous sommes restés en contact jusqu'à monter AllttA ensemble.

Est-ce plutôt vous ou lui qui êtes à l'initiative du projet AllttA ?
C'est "J" qui m'a proposé ce nom AllttA et ça a été le déclic visuel pour moi. J'ai réussi à me projeter, à imaginer les choses qu'on allait pouvoir décliner à partir de là. J'ai besoin de ce côté visuel pour me lancer dans un projet musical. À partir de là, nous avons commencé à réunir toute la matière que nous avions déjà échangée dans le but de sortir un EP ou un album.

Lorsque l'on écoute votre album The Upper Hand, on sent un côté sonore très organique et hip-hop malgré le fait qu'il y ait beaucoup d'électro. C'était une volonté de votre part dès le départ ?
Je pense que c'est assez naturel en fait. Il n'y a pas trop de réflexion à ce niveau-là, c'est quelque chose qui se fait parce que c'est l'évolution de mon style en tant que beatmaker et producteur. Ce mélange entre organique et électronique correspond à mes affinités du moment, car je ne suis pas totalement imperméable à ce qui ce fait aujourd'hui. Je pense que Jason avait aussi la volonté de faire quelque chose de moderne et de ne pas rester enfermé dans le hip-hop qui a été formateur pour nous, c'est-à-dire le côté plus jazzy et "boom-bap". Nous avons traversé quasiment trois à quatre générations de rappeurs et nous sommes toujours curieux de ce qui se fait autour de nous. Nous n'avons pas envie de rester campés dans notre vieux style.

« Nous n'avons pas envie de rester campés dans notre vieux style. »

Concernant la composition, comment avez-vous fonctionné ? Est-ce vous qui envoyiez un son et Jason qui mettait les lyrics par-dessus ou plutôt l'inverse ?
Il y a eu les deux sens. Jason avait certaines maquettes créées sur des bases rythmiques, des textes sur des boucles qu'il m'a proposés et sur lesquels j'ai crée un arrangement plus riche.

Vous nous disiez que le nom du projet vous a permis de visualiser directement ce que vous souhaitiez faire avec AllttA [NDLR : soit "A Little Lower Than The Angels" soit le dérivé du mot anglais "altar" signifiant "autel"]. Il y a un côté spirituel dans le projet...
C'est vrai que Jason vient de là, avec ce côté presque religieux dans ce qu'il écrivait. Mais il en est revenu. Et d'une religiosité, il est passé à quelque chose de beaucoup plus humaniste et spirituel. Il y a ces thèmes de la dualité, de la symétrie et de ce statut d'humain qui m'ont parlé. La dimension plus spirituelle et religieuse, la référence à la Bible dans le nom, tout cela me parle moins mais c'est quelque chose dont lui avait besoin pour développer tout le concept "lyrical" de l'album. Nous avions chacun notre colonne vertébrale dans ce nom-là, moi c'était davantage le côté visuel et graphique que m'évoquait ce mot et lui c'était tout ce qu'il pouvait y avoir derrière et qu'il allait pouvoir décliner au fil du disque.

Les thèmes que vous abordez comme le rapport aux drogues dans Drugs ou la paternité dans Baby, sont généralement peu traités dans le hip-hop. Pourquoi les avoir abordé ? Pour faire différent ?
Je pense que c'est vraiment une honnêteté et une simplicité dans l'écriture de Jason qui l'amènent à vraiment parler de choses qui sont très personnelles, que ce soit sa famille ou  son rapport aux drogues qui est peut-être un peu singulier par rapport à ce que l'on peut entendre habituellement dans le rap. Le morceau Drugs explique qu'il se sent un peu extraterrestre dans son milieu en ayant fumé son premier joint à 30 ans là où c'est "un peu légion" dans le rap. J'aime ce côté auto-dérision. C'est ce que je développais aussi à travers Hocus Pocus. Jason n'a pas peur de se dévoiler et d'aborder des choses très privées et pas forcément les plus sexy de sa personnalité donc je trouve que c'est une approche de l'écriture assez intéressante.

« "J" mène la scène au micro de manière assez impressionnante, il ne fallait donc pas lui enlever cela. »

Sur scène, vous laissez une grande place aux animations vidéo. Comment avez-vous fonctionné pour créer tout cela ?
C'est justement le nom qui a été le point de départ de la création des animations. Le travail s'est effectué autour de la symétrie, avec un côté très géométrique et graphique. J'avais déjà un peu développé ce style de choses en écrivant les story-board pour C2C à l'époque. Pour le live d'AllttA, je me suis occupé de développer des animations en collant à la fois à la musique et au texte. Il ne fallait pas cela vampirise le show mais que ce soit un élément lumineux supplémentaire appuyant ce qui se déroule sur scène. C'est vrai que "J" mène la scène au micro de manière assez impressionnante, il ne fallait donc pas lui enlever cela.

AllttA [+ Étienne de Crécy + 1 000 Chevaux-Vapeur + The Geek x VRV + The Shoes + Jabberwocky], samedi 10 juin au Palais des Spectacles dans le cadre de Paroles & Musiques


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