Terrenoire : « Le Black Paradiso ? Un jeu d'enfant, un imaginaire qui prend vie »

Le duo stéphanois Terrenoire formé par les deux frères Raphaël et Théo Herrerias, sort son premier disque. Un EP éponyme regroupant six de leurs créations poétiques et enjôleuses. L'occasion de discuter de l'univers du groupe avec Raphaël, l'aîné.


Quel a été le déclencheur de cette nouvelle aventure musicale pour votre frère Théo et vous-même ? Vous n'aviez pas eu de projet artistique aussi abouti ensemble jusqu'à Terrenoire ?
Raphaël Herrerias : Non, c'est vrai. Nous avions fait des essais sur quelques chansons. Il y a vraiment quelque chose qui s'est aligné à un moment donné. C'était un moment où Théo avait bien avancé sur son projet solo 1000 Chevaux-Vapeur. La genèse de Terrenoire a été un concert à Lyon, en janvier 2016 dans la salle À Thou Bout d'Chant, où Théo a monté avec moi une partie de mon répertoire. Je devais me produire en guitare/voix et au final il est venu ajouter ses machines. C'était alors évident ! On s'est dit qu'on tenait quelque chose.

J'ai besoin, dans la visualisation d'un projet, de le penser comme un récit. Cela m'aide à créer et peut donner de la cohérence à tous éléments constituant un projet musical aujourd'hui : la musique, les textes mais aussi les images, les vidéos...

La création de cet univers mêlant Terrenoire, le Black Paradiso... était une idée que vous aviez depuis longtemps ou c'est venu progressivement ?
C'est une bonne question. Pour ma part, j'ai besoin, dans la visualisation d'un projet, de le penser comme un récit. Cela m'aide à créer et peut donner de la cohérence à tous éléments constituant un projet musical aujourd'hui : la musique, les textes mais aussi les images, les vidéos... Nous pourrions même aller plus loin et mettre sur pied des courts métrages, une nouvelle, un film d'animation... Ce n'est pas d'actualité car nous avons encore beaucoup de travail sur la musique. Mais pourquoi pas. Quand j'étais enfant, j'avais envie d'écrire des scénarios. Avec mon frère, nous avions un petit caméscope et nous tournions déjà des images à Terrenoire, au château de la Perrotière ou au stade de Janon. Un peu comme nous l'avons fait pour les premiers clips de Terrenoire. Donc cette volonté de filmer, de raconter une histoire correspond aussi à une redite de l'enfance. L'idée générale est venue également grâce à l'arrivée de Théo. Cette volonté narrative est quand même venue assez tôt.

Vous créez vraiment tous à deux ?
Les textes, c'est moi. La musique, c'est vraiment à deux. J'arrive avec quelque chose de squelettique, je pose une voix sur quelques accords et Théo apporte du corps. Nous composons réellement à deux.

Transcender le réel pour en faire quelque chose de plus grand, de plus beau, une utopie. Le Black Paradiso c'est un lieu vers lequel on se dirige mais également, dans notre imaginaire, un cap qui nous permet de rester dans la beauté.

Terrenoire et Black Paradiso sont deux thématiques qui se répondent. Pourriez-vous nous en dire davantage ?
Le Black Paradiso contient plusieurs visions. Toujours dans cette idée de narration, c'est en quelque sorte le pendant de Terrenoire. L'idée est de se dire comment fait-on pour inventer une destination qui a quelque chose de l'ordre de l'enfance. À quel point sommes-nous capables de faire émerger ces lieux, cette destination, d'invoquer les choses, de les faire apparaître ? Le Black Paradiso était simplement une idée apparue lors d'une improvisation. On l'a gardé et enregistré sur ordinateur. Plus on avançait plus on se disait que cette expression racontait quelque chose. C'est vraiment transcender le réel pour en faire quelque chose de plus grand, de plus beau, une utopie. Le Black Paradiso c'est un lieu vers lequel on se dirige mais également, dans notre imaginaire, un cap qui nous permet de rester dans la beauté. Dans une carrière musicale, c'est un parcours du combattant afin de rester intègre, sincère dans sa création par rapport à son imaginaire. C'est l'avènement de l'imaginaire à l'intérieur de la vie. Ca peut faire marrer les gens mais on cultive cela, on en parle, notre label s'appelle par exemple Black Paradiso. Ça nous fait rire d'avoir une carte bancaire où il est inscrit "Black Paradiso", de discuter avec notre banquière du compte "Black Paradiso".... C'est un jeu d'enfant, un imaginaire qui prend vie. C'est important de sortir du quotidien qui peut être cruel et violent.

Vous sortez votre premier EP avec six titres. Comment avez-vous sélectionné ces titres ?
C'est le live qui a déterminé la présence de ces titres. C'était assez naturel. Nous étions d'accord très vite avec Théo. Les thématiques de cet EP touchent au départ avec Le Silence, la route avec Allons là-bas, l'imaginaire de la grande ville que l'on a atteint avec Je bois tout seul, La nuit des parachutes et Le cœur en latex. On voulait garder cette idée narrative dans l'EP. On essaie de poétiser notre existence mais on colle définitivement au réel.

L'écho que Terrenoire a connu est important au niveau national entre les retours positifs des médias, les concerts... Comment avez-vous vécu tout cela avec Théo ?
C'est un peu irréel. On avait projeté cette arrivée à la grande ville avec ces signaux de réussite. Notre résidence sur France Inter avec Didier Varrod, le Printemps de Bourges... C'est comme des moments où l'on se dit, ça y est on y est, c'est une rampe de lancement pour faire découvrir nos chansons. Mais en même temps, on se dit que la route est encore très longue. Nous n'avons pas de public. Les augures sont belles mais nous ne sommes pas dupes. Ce métier est difficile. Nous pensons que c'est par la scène, les chansons que le public viendra. Nous espérons un jour remplir un Fil par exemple, ce serait génial !

Terrenoire, sortie de l'EP le 12 octobre


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