"Les Invisibles" : Enfermées dehors

De Louis-Julien Petit (Fr., 1h42) avec Audrey Lamy, Corinne Masiero, Noémie Lvovsky…


Manu dirige L'Envol, un centre d'accueil de jour pour femmes SDF. La tutelle municipale ayant décidé de sa prochaine fermeture, Manu et ses éducatrices entrent en campagne pour accélérer la réinsertion de leurs habituées. Quitte à outrepasser leur rôle et à tricher avec les règles…

Louis-Julien Petit va-t-il devenir le porte-voix des sans-voix, le relai des opprimé·es et des victimes du déclassement social, avec Corinne Masiero en égérie ? Discount (2015) pointait les aberrations éthiques d'une grande distribution préférant détruire des denrées au seuil de péremption plutôt que de les distribuer aux nécessiteux ; Les Invisibles dénonce dans la foulée les rigidités administratives du secteur social, ainsi que la disparition de l'humain dans la “gestion“ (prenons à dessein des expressions comptables, c'est dans l'air du temps) d'une misère déplacée dans des méga-complexes hors des villes. 

S'il recourt volontiers à la comédie de caractères réaliste et aigre-douce prisée par Paul Laverty, —en manifestant une nette prédominance pour les figures féminines —, Petit a encore du mal à s'affranchir de la double influence du scénariste de Loach et d'un “cinéma à gags“ plus classique avec ses récurrences, sa construction dramatique et ses effets attendus. Voire ses personnages : le premier plan sur les dreads en carton de Sarah Suco permet de comprendre qu'elle sera celle par qui la merde arrivera. Espérons toutefois Petit persévère dans la recherche d'une voie médiane qui le fera passer des films “concernants“ sympathiques à un geste cinématographique majeur.


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