"À cause des filles… ?" : Les femmes… et leurs amants marris

À la fois désuète et très contemporaine, cette imbrication de sketches parlant de l'éternel jeu de chat et chien que se jouent femmes et hommes signe le retour de Pascal Thomas dans son genre de prédilection : la comédie de mœurs chorale. Sous le satin, le papier de verre…


Sortant de l'église où elle vient de convoler, une mariée voit avec stupeur son époux s'enfuir avec une autre femme. Lors de la noce qui s'ensuit, invités et témoins de ce coup de théâtre rivalisent d'anecdotes illustrant l'insondable versatilité de la vie conjugale…

Les plus vénérables se souviendront de La Vie à deux (1958) un florilège d'histoires de couples glanées dans les œuvres de Guitry, dessinant une mosaïque du tandem conjugal à l'époque du vieux maître. Pascal Thomas nous offre une réactualisation de ce portrait de ce plus en plus abstrait, de sa touche alerte et fantaisiste. Défauts inclus : on ne le reprendra plus sur ses post-synchro hasardeuses qui, avec le temps, confinent à la marque de fabrique autant que ses distributions d'habitués (Christian Morin, Bernad Ménez, Victoria Lafaury) ou ses aphorismes. 

Celles qui nous ont bien eus

Parmi cette collection de sketches, certains semblent adaptés de ces histoires insolites (et pourtant authentiques) jadis racontées par Pierre Bellemare — telle celle du chauffeur de taxi  père de famille nombreuse, se retrouvant avec un polichinelle supplémentaire abandonné par une passagère indélicate. D'autres, plus ou moins fantasques, paraissent servir de prétexte à la mise en boîte d'un plan croquignolesque : Bernard Menez en travestie, Audrey Fleurot saucissonnée sur canapé, Rossy de Palma posant pour un faux-peintre subjugué par ses appâts. Et si toutes ces plaisantes saynètes n'étaient que des zakouskis destinés à offrir une diversion avant la pièce de résistance ; un objet de transgression corrosif constitué par le segment se déroulant juste après Mai-68, montrant un incident entre un élève et une professeure apparemment libérale ? D'aucun·es traiteront certainement Pascal Thomas de réac pour avoir osé composer cette séquence iconoclaste en plein éclosion du mouvement #MeToo. Pourtant, ne raconte-t-elle pas à la fois le chamboulement rapide des repères, l'hypocrisie de certains tenants de l'autorité et la capacité de nuisance des manipulateurs ? Lesquels sont parfois, parité oblige, des manipulatrices…

À cause des filles…? de Pascal Thomas (Fr., 1h40) avec José Garcia, Marie-Josée Croze, Audrey Fleurot…


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La distance n’est rien