Chasse à la femme

Avec Le Monde Renversé, quatre anciennes élèves de la Comédie de Saint-Étienne démontent les mécanismes de persécution des femmes à travers les siècles.


Enfants, nous étions effrayés par leurs nez crochus et leurs grands chapeaux pointus. Plus tard, en explorant les méandres de l'Histoire occidentale, on découvrait qu'elles n'avaient jamais porté de costume, ni voyagé à califourchon sur leurs balais. Mais qu'elles avaient plutôt été envoyées au bûcher pour s'être accrochées à leur liberté ou avoir tenté de se révolter ; enfermées pour n'avoir jamais pu enfanter ; mises à mort pour avoir voulu soigner à l'aide de quelques plantes infusées. Toutes, déclarées coupables, considérées comme de vilaines sorcières, parce que sans doute un peu trop mystérieuses pour le monde, dominé alors par les hommes… « Empoisonneuses ». « Voleuses de pénis ». « Vieilles lubriques acoquinées avec le diable ». « Vicieuses ». « Affreuses ».

Dimension politique

Dans un joyeux bordel, quatre jeunes comédiennes revisitent la figure de la sorcière, décortiquant son aspect éminemment politique. Car le mythe n'est ici que le point de départ. Le prétexte même, pour aborder en réalité la question du corps féminin. Celui qui renferme sous la pudeur quelques secrets, celui que l'on ne peut que fantasmer, celui qui finit donc par déranger. Ainsi Clara Bonnet, Marie-Ange Gagnaux, Aurélia Lüscher et Itto Mehdaoui mettent-elles en scène les mécanismes de persécution et d'oppression de la femme par l'homme à travers les époques. Et si les grands philosophes qui nous ont aidés à penser le monde avaient oublié la moitié de l'histoire ? Où donc sont les femmes, dans leurs grandes réflexions ?

Pièce écrite au plateau, Le Monde renversé mêle impro, écrits produits en cours de route et fragments de différentes sources littéraires. Progressivement, les quatre comédiennes parviennent ainsi à un rééquilibre de la société, démontrant la corrélation entre la naissance du capitalisme et l'assujettissement du corps des femmes… Avec au moins autant d'humour que d'engagement.

Le Monde renversé, du mardi 9 au jeudi 11 avril à la Comédie de Saint-Étienne


<< article précédent
"Synonymes" : Paris est une quête