"Première Campagne" : Une autre partie de campagne

De Audrey Gordon (Fr. 1h12) avec Astrid Mezmorian…


L'arrivée à la rédaction de France 2 d'Astrid Mezmorian coïncide avec l'entrée en lice d'un outsider pour la Présidentielle 2017, Emmanuel Macron. Priée de suivre la campagne du novice, la nouvelle venue s'acquitte de cette tâche jusqu'à l'élection. Deux “premières fois“ se croisent…

Atypique à bien des égards, la dernière Présidentielle en date aura donné lieu à une inflation d'images, dont un certain nombre de reportages hagiographiques (qualifiés un peu hâtivement de documentaires, alors qu'ils dépeignaient dans le plus pur style courtisan/partisan les mirifiques mérites de leurs si lisses sujets) consacrés à Macron, Mélanchon — on n'a pas vu celui centré sur Lassalle, mais on doute qu'il soit aussi féroce que le Depardon sur VGE.

En suivant une jeune journaliste agrippée aux basques d'un candidat, Audrey Gordon est exempte de toute complaisance vis-à-vis de celui-ci : ses images de Macron ne constituent qu'une matière secondaire de son tournage. La distance qui est la sienne permet en outre de constater à quel point l'essaim médiatique, agglutiné sur futur monarque en représentation, manque de recul et se complaît à restituer les mêmes icônes imposées, fabriquant une légende dorée en direct.

S'il raconte en creux l'usage (l'instrumentalisation ?) par le politique des médias, il révèle aussi le travail de coulisses d'une bleue plongeant dans le feu exaltant d'un “moment“ démocratique — où le journalisme tutoie l'Histoire — entre pics d'adrénaline, affirmation d'autorité, coups de bol et remise en question permanente (sous la férule bienveillante de Nathalie Saint-Cricq). Un document précieux à montrer dans les écoles de journalistes.

Mais la plus percutante (et clairvoyante) analyse du candidat, on la doit au père d'Astrid Mezmorian qui pointe les artifices tribunitiens dont Emmanuel Macron a (ab)usé pour mesmériser les foules. Jupiter ayant depuis perdu de son aura, les faits lui donnent raison. Toujours cette histoire de recul…


<< article précédent
"Raoul Taburin" : Le supplice du deux-roues