Dur dur, d'être une fille à la campagne

Le centre d'art Kommet consacre à l'artiste brestoise Johanna Cartier sa première exposition personnelle à Lyon, autour du thème de la vie des adolescentes à la campagne dans les années 2000.


« Et nous, on était cinq chômeurs à s'lamenter sur notre malheur en se disant qu'on se taperait bien la fille du coupeur de joint... ». Pas facile d'être une fille de la campagne dans les années 1970 (cette chanson d'Hubert-Félix Thiéfaine date de 1978), et cela ne semble guère avoir changé au XXIe siècle. C'est ce qu'affirme et montre Johanna Cartier, qui a vécu son enfance et son adolescence dans un village un peu perdu dans la « diagonale du vide », à travers son installation et ses œuvres à caractère autobiographique à Kommet.

Sur un faux gazon, trône une cage de football décorée de strass et dont les filets sont un voile de mariée. Un voile menant tout droit à un dessin quelque peu "brutaliste" d'un couple marié. À gauche de la cage, sur un mur jaune, aussi phosphorescent qu'un vaste champ de colza, se découvrent plusieurs objets, signes, citations symboliques d'une condition adolescente où, au moindre écart, une fille peut être cataloguée de facile, délurée, « tchoin ». Et est livrée comme cible à de nombreux prédateurs.

Faces cachées de la société

À partir de matériaux de récupération ou d'éléments sculptés, peints, dessinés, écrits, Johanna Cartier évoque à la fois une certaine atmosphère existentielle, et joue sur les mots et sur les choses pour dire l'étouffement adolescent, le destin sans perspective, le labour des préjugés et des étiquettes… Ou évoquer de plus rares possibilités d'émancipation et de douceur de vivre.

Le tout est drôle, piquant, vif. Et si cette exposition a un caractère très autobiographique, elle participe aussi du travail plus général de l'artiste qui documente et met en scène des pans méconnus de notre société. D'autres de ses projets ont par exemple porté sur les PMU, la vie des chauffeurs routiers, les concours canins… Un travail caustique, empathique et singulier, à découvrir à Kommet et à suivre à l'avenir.

Johanna Cartier, Terrains fragiles, amour miskine
À Kommet jusqu'au samedi 11 février

 


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