Les films de la semaine


À  voir

★★★☆☆Les Feuilles mortes

Dans la nuit d'Helsinki, le hasard fait se croiser Ansa et Holappa, deux célibataires peu causants qui se disent qu'ils pourraient partager leur solitude. Hélas, divers aléas vont s'ingénier à différer leur retrouvailles…

À la façon de l'éternel prélat “entré pape au conclave pour en ressortir cardinal“, Kaurismäki a été hâtivement donné Palme d'Or à Cannes pour cette bluette entre alcool, vieux célibataire gominé et mutisme rugueux, où les ruelles désertes, les intérieurs rétro et les aplats pastels font office de dialogue. Bien sûr, cela fait plaisir que le cinéaste finlandais soit sorti de sa retraite pour adresser cette carte postale nostalgique mais elle n'ajoute rien à sa gloire. Quant au Prix du Jury qu'elle a reçu, il traduit quelque part l'embarras des jurés ne pouvant décemment laisser repartir bredouille le vétéran nordique, ni la poésie de ses personnages défraichis. Si cette suite de saynètes volontiers émaillée d'absurde n'est pas (comme il a été un peu survendu) un hommage au cinéma, elle abrite son content de tendresse ou d'insolite. Difficile de ne pas esquisser un sourire face à la séquence de karaoké… ni de trouver que le couple Alma Pöysti/Jussi Vatanen donne l'impression de voir Liv Ulmann et Bastien Bouillon avec quelque chose de changé…

De Aki Kaurismäki  (Fin., 1h21) avec Alma Pöysti, Jussi Vatanen, Janne Hyytiäinen…


★★★☆☆Last Dance ! 

À 75 ans, Germain vient de perdre son épouse et se trouve étouffé par la présence de ses enfants, qui veillent sur lui avec une pointe de dirigisme. Pour leur échapper, il rejoint en secret la troupe de danse avec laquelle son épouse devait collaborer. Une double vie inattendue débute alors pour lui…

On pourrait parler d'un sujet générationnel, traitant à 360° de la situation des baby boomers confrontés au deuil autant qu'au sentiment de ne pas être (encore) des personnes âgées — de fait, la “vieillesse” d'aujourd'hui n'est plus celle d'hier : même les termes pour la qualifier ont changé et se sont aseptisés. Et c'est leur progéniture hyper-angoissée qui prend cher, ici dans sa volonté de contrôle absolu, aux antipodes de l'esprit décomplexé des post-babas tels que Germain ! Plus enclin à bouquiner et tenter des expériences contemporaines que de manger à heure fixe des barquettes sous plastique, celui-ci se retrouve donc à mentir, à fuguer… à être dans la position du gosse de ses propres enfants, en somme. Delphine Lehericey dose habilement la dimension comique née de ce renversement pour ne pas tomber dans la farce : Last Dance ! conserve son arrière-plan mélancolique et sentimental (autour de la présence/absence de la défunte), le fil de la danse servant ici à panser les plaies comme à recoudre les liens distendus. Attachant.

De Delphine Lehericey (Sui.-Fr., 1h28) avec François Berléand, Kacey Mottet Klein, Maria Ribot…


À la rigueur

★★☆☆☆L'Arbre aux papillons d'or 

Saigon, de nos jours. Thien est chargé de rapatrier dans son village natal le corps de sa belle-sœur ayant péri dans un accident de moto ainsi que son fils de 5 ans, Dao, qui a réchappé au drame. Sur place, en partant en quête de son frère aîné, il se confronte à son passé…

Caméra d'Or à Cannes, voilà qui pose un auteur débutant et attise la curiosité. Après découverte, on se montre toutefois dubitatif. Posons clairement les choses : la durée de cette épopée intime n'est nullement en cause, ni la virtuosité du réalisateur — lequel enchaîne des plans-séquences de haute volée, dans des conditions sommaires. On est plutôt assommé par cette petite musique lancinante venant parasiter ce qui pourrait être une épopée intime à la Kore-eda ou Kitano en la lestant de liturgie. Pham Thien An semblant confondre spiritualité et religiosité, son cinéma s'empèse dans la culpabilité morale alors qu'il a la tentation de s'élever vers l'onirique. Dommage.

De Pham Thien An (Viet., 2h58) avec Le Phong Vu,  Nguyen Thi Truc Quynh,  Nguyen Thinh…


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