Le Temps de l'aventure

Le Temps de l'aventure
De Jérôme Bonnell (Fr, 1h45) avec Emmanuelle Devos, Gabriel Byrne...

Brève rencontre entre une comédienne de théâtre et un Anglais endeuillé, un 21 juin à Paris : un petit film charmant et très français de Jérôme Bonnell, sans fausse note mais sans élan non plus. Christophe Chabert

Il y a toujours quelque chose de touchant à voir un cinéaste faire une déclaration d’amour à une actrice… C’est en tout cas une évidence qui saute aux yeux dès le début du Temps de l’aventure : Jérôme Bonnell a voulu offrir un beau cadeau à Emmanuelle Devos, dont on sait à quel point elle se plaint de la maigreur des personnages féminins dans le cinéma français, à travers Alix, comédienne de théâtre vivant depuis longtemps avec un homme que l’on ne verra jamais, et dont on imagine que leur relation est à un tournant — on ne dira pas lequel.

Une séquence, d’ailleurs, est une merveilleuse mise en abyme de cette fascination. Alix va passer un casting pour un long métrage : seule face à la caméra vidéo d’un obscur assistant qui lui donne la réplique, elle a droit à deux «prises», la première sur un ton de comédie, la deuxième beaucoup plus mélodramatique. Dans les deux, elle est parfaite et c’est évidemment tout le talent d’Emmanuelle Devos, son sens magistral de la rupture de jeu, qui éclate à l’écran.

Paris vaut bien une aventure…

Cet instant de grâce n’est qu’une parenthèse dans un récit qui la voit croiser, au retour d’une représentation en province, un Anglais dans un train (Gabriel Byrne, en pleine délocalisation française après Le Capital), dont elle s’éprend instantanément. Coup de foudre réciproque qui va les emmener d’un enterrement à une chambre d’hôtel, des rues de Paris en pleine fête de la musique à un quai de gare, histoire de parfaire cette brève rencontre entre David Lean et Claude Sautet.

Plutôt bien écrit, servi par une gestion intelligente des silences, un érotisme discret et pudique ainsi que quelques instants de pure comédie — la visite d’Alix chez sa sœur Bobo, le verbiage incessant d’un intellectuel parasite — Le Temps de l’aventure tricote avec application un programme bien français sans jamais commettre de fausses notes. Bonnell trace son chemin à la manière d’un Emmanuel Mouret, construisant une œuvre avec ses hauts et ses bas, mais qu’on sent désespérément bornée par un petit manque d’ambition.

Si Le Temps de l’aventure prouve sa maîtrise réelle de son univers, on ne peut que constater aussi qu’on en fait vite le tour, sans déplaisir mais sans véritable passion.

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