Décembre : Un Noël plein d'esprit(s)

Panorama ciné / Scrooge n’est pas le seul à voir apparaître des fantômes au moment de Noël : les écrans de cinéma, pourtant habitués aux figures spectrales, connaissent en cette fin d’année un surprenant déferlement de films hantés par des défunts ou des esprits. Drôles de cadeaux !

Non, n’insistez pas, nous ne dirons rien (pour le moment) du spin-off de Star Wars, Rogue One ; pas un mot non plus d’Assassin’s Creed. Mais que ces hauts sapins ne cachent pas la forêt de décembre… qui compte quelques arbres malades — tel Personal Shopper (14 décembre). Aberrant Prix de la mise en scène à Cannes, cette pseudo histoire de spectre est surtout une inutile prolongation du ticket de Kristen Stewart chez Assayas. S’il tenait à satisfaire une envie de la suivre en scooter dans les rues Paris, le réalisateur pouvait se faire paparazzi, au lieu de tourner cette farce insipide ne racontant rien et ne prenant même pas la peine de tenter l’exercice de style fantastique. Peut-être a-t-il tenté de concurrencer son maître Hou Hsiao-hsien sur le terrain de la vacuité stérile ?

Dans Sex Doll (7 décembre), Sylvie Verheyde a, quant à elle, jeté son dévolu sur une incarnation d'escort girl travaillant à Londres et décrit, comme elle en a l’habitude, une faune populo-marginale entre chien et loup. Deux obstacles majeurs : c’est invariablement confus, déprimé-déprimant, interminable ; et puis, sans faire insulte à Hafsia Herzi, l’interprète du rôle principal, la jeune comédienne n’a pas le physique bimboesque de l’emploi — plutôt rassurant pour elle.

À voir… pourquoi pas ?

L'Ami, François d'Assise et ses frères (28 décembre) profite des fêtes pour se glisser sur les écrans. Ne lésinant ni sur le bucolique, ni sur les p'tits zoizeaux bécotant l’exalté prêcheur, cette évocation du saint fondateur de l’ordre des frères mineurs signée Renaud Fely et Arnaud Louvet raconte comment son ami Élie dut le “trahir” afin que Rome reconnaisse sa communauté professant paix et pauvreté. D’ordinaire commis d'office dans les films d'apôtres barbus en robe de bure, Michael Lonsdale ne vient pas promener ici sa silhouette d'ursidé trappiste — étonnant.

Qui souhaitera verser sa larmichette en famille se dirigera sans hésiter vers Demain tout commence (7 décembre) le nouveau film d’Hugo Gélin — qu’on va soupçonner, après Comme des frères, d’accointances avec les fabricants de mouchoirs en papier. Il met en effet en scène Omar Sy en papa célibataire susceptible de perdre doublement sa fille : parce que sa mère démissionnaire décide brutalement d’en récupérer la garde, et parce que la gamine est atteinte d’une sale maladie. Parfait mash-up de la chanson de Balavoine Mon fils ma bataille et du film L’Arbre de Noël (1969), ce piège à sentiments est toutefois un peu trop produit pour être sincère.

Le plaisir toujours renouvelé de voir Golshifteh Farahani rend très supportable l’austère Go Home (7 décembre) de Jihane Chouaib, où une exilée libanaise de retour dans la maison familiale entreprend d’élucider un mystère datant de son enfance, malgré l’indifférence — voire l’hostilité — du village. C’est l’inconscient du pays, marqué par la guerre que la réalisatrice dépeint ; un pays au patriarcat fort… et au machisme latin latent assez consternant.

À voir… plus volontiers

Dans Une semaine et un jour (14 décembre), Asaph Polonsky présente les conséquences inattendues d’un deuil pour des parents, au-delà de la période rituelle de 8 jours. Si l'accablement et la colère semblent désinhiber le père à la manière de Kevin Spacey dans American Beauty, ces chemins détournés lui permettront, en définitive, d’accepter l’inacceptable.

Un fantôme plus cérébral s’insinue dans À Jamais (7 décembre), où Benoît Jacquot inspiré par une nouvelle muse, poursuit, infatigable son œuvre de cinéaste. Poursuivre, c’est d’ailleurs le principe de ce thriller “métapsychologique” dans lequel une jeune comédienne réinvente à travers son propre corps la présence de son défunt réalisateur de compagnon. Troublant, intrigant, au point d’égarer parfois, mais plongeant dans une ambiance onirique rappelant le Femme Fatale de DePalma.

Terminons avec Fais de beaux rêves (28 décembre) du vétéran Marco Bellocchio. L’histoire d’un enfant qui perd sa maman, et de l’homme qu’il est devenu, marqué par cette douloureuse fracture. Tout à la fois portrait psychologique empli de subtile délicatesse et traversée dans l’Italie des quarante dernières années, ce film qui touche l’âme unira les spectateurs et leurs mères dans les salles entre les deux réveillons. Un vrai cadeau.

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