Géométries variables


Le souffle d'un bandonéon lance une balle rouge. Petite, elle se découpe dans le noir. L'œil focalise sur l'objet, alors qu'apparaissent deux longues frites. L'une est bleue (la dame), l'autre blanche (le monsieur): ils se font la cour, s'enlacent, s'aiment. La petite balle rouge incarne la passion, bondit, boule d'amour énergique, nid fécond. Paf. Ça donne un enfant. Celui-ci à une tête ronde, un petit corps bleu clair, mélange réussi des parents géométriques. Là, on se demande comment font les hommes invisibles, véritables magiciens, qui manipulent derrière, avec virtuosité et souplesse ces formes découpées dans de la mousse. Comment font-ils pour les rendre si vivantes, présentes, humanisées, émouvantes ? Ces questions superflues s'estompent : on est dépassé et envahi par l'univers très lunaire. D'ailleurs, la balle va prendre beaucoup de place, jusqu'à déborder. Elle est jeu de balle entre parents enfants. Elle est la solitude de l'enfant au moment de la séparation des parents. Cette séquence est magnifiquement matérialisée par un mur bicolore (bleu et blanc) que les parents déconstruisent ; chacun se réappropriant sa couleur. D'un côté les briques blanches, de l'autre les bleues. Accompagnée par une musique de Jacques Trupin, seul homme visible, cette scène transmet la tristesse infinie de l'enfant. Le petit bonhomme, derrière le mur défait, est resté seul avec sa boule rouge. Pas de morale. Ni de solution miracle. Juste le constat d'une situation déséquilibrante. Et la question qui se pose : comment grandir, se construire après ? La force de La Balle Rouge, conçue par la Compagnie le Chat Pitre, est d'aborder le thème grave du divorce des parents en adoptant le point de vue de l'enfant. Dépourvue de parole, cette forme nous plonge d'autant plus dans la tête de l'enfant ; et celui-ci se construira malgré tout dans le plaisir retrouvé. SDLa Balle rouge Le 24 à 14h30 et le 25 janvier à 10h et 14h30, au Cinéthéâtre de la Ponatière (Échirolles)


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So long, mister P