Choc au sommet

Le dernier spectacle de la saison de la MC2 est aussi l'un des plus attendus. Soit la rencontre sur scène entre deux monstres sacrés de la danse contemporaine : le Britannique Akram Khan (qui clôture sa résidence grenobloise) et l'Espagnol Israel Galván. Zoom sur une aventure dont on ne sait finalement pas grand-chose ! Aurélien Martinez


Un vent de mystère plane autour du spectacle Torobaka, en création en ce moment à la MC2, avant une première mondiale prévue le lundi 2 juin. Pas de possibilités d'assister à des répétions ou à un filage, pas d'interviews accordées à deux semaines des représentations... Du coup, on est obligés de lire de fond en comble le dossier de presse – ce qui, au passage, ne nous arrive pas si souvent !

« La tradition est comme de l'oxygène le jour, et la nuit du dioxyde de carbone. La tradition d'Israel serait le flamenco, le kathak serait mon oxygène. Cela fait de nombreuses années que j'ai soif d'un espace où ces traditions respectives puissent coexister l'une avec l'autre pour créer une nouvelle dynamique de danse. Mais la raison pour laquelle j'attendais était simplement que je n'étais pas inspiré par l'idée de faire ce que d'autres artistes avant nous ont tenté, et qui consistait à illustrer un lien entre les deux traditions. Comment briser le moule ou la tradition de l'intérieur? Ce n'est que lorsque j'ai finalement vu Israel danser que je me suis rendu compte qu'il était l'artiste que j'attendais pour parcourir cette route de découverte et d'anarchie. » Ainsi parlait Akram Khan dans la note d'intention.

Deux mondes frères

Cette idée de tradition relie fortement les deux artistes : le kathak pour le Britannique Akram Khan et le flamenco pour l'Espagnol Israel Galván. Mais des traditions revisitées : de la danse ancestrale du nord de l'Inde, Akram Kahn ne garde que l'esprit, la technique, pour insuffler en elle une imagerie moderne, comme dans le touchant Desh vu à la MC2 (un solo centré sur sa double culture, avec un voyage sur les traces du Bangladesh de son père). Quitte à parfois frôler l'emphase visuelle, mais toujours avec classe et maîtrise – sa dernière création iTMOi dévoilée la saison passée à la MC2 en était un exemple parfait.

Un cheminement similaire, côté flamenco, avec Israel  Galván, qui a livré des chorégraphies fascinantes où l'art andalou se voyait restructuré et débarrassé de ses oripeaux pour mieux réapparaître sous les yeux du public du XXIe sicèle – on pense aux fascinants Arena et La Edad de Oro, tous deux présentés à la MC2. Quitte, là aussi, à parfois en faire beaucoup trop – l'indigeste El final de este estado de cosas sur l'Apocalypse, inédit à Grenoble !

« Remercier le public »

Pour Torobaka, leur première collaboration, les deux danseurs-chorégraphes seront donc tous deux sur le plateau, entourés de cinq musiciens. Malgré leurs nombreux points communs (notamment leurs approches respectives du geste, très étudiées), voir leurs univers se confronter pourrait donner des étincelles. Par exemple, quand Akram Kahn semble parfois s'abandonner du côté du mysticisme, Israel Galván apparaît quant à lui plus brut, plus terrestre.

« Je pense qu'Akram a grandi en croyant en beaucoup de dieux. Ma famille m'a appris à croire en un seul. J'aimerais rencontrer beaucoup de ses dieux et remercier le public pendant que je danse » écrit l'Espagnol dans ce fameux dossier de presse ! Intrigant, oui...

Torobaka, du lundi 2 au samedi 7 juin, à la MC2

Critique en ligne le lendemain de la première représentation


<< article précédent
(Dé)voiler le réel