La Belle électrique, « une salle de 2015 »

Enfin ! Après plus de vingt ans d'attente, la Belle électrique, salle dédiée aux musiques amplifiées, va ouvrir ses portes à Grenoble, quartier Bouchayer-Viallet. On l'a visitée, on a rencontré l'équipe aux commandes, on a analysé sa prog ; tout ça avant de partir boumer ce samedi 10 janvier pour l'inauguration officielle. Aurélien Martinez


Une bonne vingtaine d'années : voilà le temps qu'aura pris la Belle électrique pour voir le jour. Le projet fut ainsi long à se mettre en place, avec de nombreuses péripéties qui appartiennent désormais au passé. Du coup, une salle imaginée dans les années 1990 est inaugurée en 2015, avec pourtant un résultat tout à fait dans son temps comme l'assure son directeur Frédéric Lapierre. « On a la chance d'avoir un lieu qui est beau. Pour moi, c'est une salle de concert de 2015, pour les musiques de 2015. On a une scène avec un rapport frontal pour le live, mais on a aussi de la vidéo, des espaces pour déplacer des DJs, la possibilité d'ouvrir tard dans la nuit [certaines soirées termineront à six heures du matin – NDLR] : c'est ça une salle en 2015.  »

L'architecture intérieure est impressionnante, avec ses grands espaces, ses gradins aérés, ses balcons facilement accessibles, ses écrans pour les projections. On l'a certes vue vide de monde, mais la Belle électrique a tout de la grande salle agréable tant pour le public que pour les artistes – elle a d'ailleurs été pensée pour offrir une jauge intermédiaire (950 places) entre un immense Summum et des lieux plus petits comme la Bobine ou la Source.

« La logique de l'entonnoir »

Choisie en 2008 par la Ville de Grenoble, MixLab, l'asso qui va gérer l'équipement en délégation de service public, a eu le temps de penser son projet. « On a été très marqués électro lors de la préfiguration. C'est vrai qu'on a des gens dans notre équipe qui sont là-dessus. Et on a fait beaucoup de prog électro en amont, notamment avec notre festival Jour & Nuit. Du coup, on a beaucoup parlé de la dimension clubbing. Mais c'est avant tout une salle de concert, qui va certes permettre de faire du clubbing, mais pas que. »

Leur première programmation était très attendue : surprise, ça part dans tous les sens, dans toutes les esthétiques ! Olivier Dahler, le responsable de la programmation, s'en explique : « Sur un lieu de cette capacité, la programmation ne peut être que large, parce qu'on n'est pas des intégristes. » Frédéric Lapierre : « Pour amener les gens dans des salles de concert, quand on a une jauge de presque 1000 places et quand en plus on vient d'ouvrir, on a intérêt à balayer large. J'ai bien envie par exemple que des très jeunes viennent voir Frero Delavega et reviennent ensuite pour autre chose de moins connu. » Olivier Dahler : « C'est la logique de l'entonnoir : d'abord voir comment ça réagit sur ce premier semestre de programmation pour ensuite resserrer – ce qui ne veut pas dire devenir obtus ou élitiste. »

Les prochains mois, on trouvera de l'électro, de la pop, du reggae (Olivier Dahler fut un temps le monsieur reggae de Grenoble)... Avec des têtes d'affiche (Nina Hagen, UB40, Christine ans the Queens, Sinsemilia…) et des découvertes. Bref, une salle généraliste (enfin, dans une moindre mesure – on n'imagine pas Calogero s'y produire !) qui sera là en complément des autres déjà existantes dans l'agglo (la Belle électrique va même bosser en liens étroits avec le Ciel), tout en mettant en avant ses spécificités. Frédéric Lapierre : « Un Gilles Peterson sur du minuit six heures, où tu le fais si tu ne le fais pas à la Belle électrique ? »

« Il ne faut pas qu'on déçoive »

Surtout, MixLab veut faire de cette Belle électrique un véritable lieu de vie, avec donc des concerts, mais aussi un restaurant, des soirées dans le bar (les jeudis ou vendredis, avec fin entre 1h et 2h), diverses animations en lien avec des structures culturelles (comme le centre d'art le Magasin, situé juste à côté)… Tout ça dans un quartier d'habitations – le parvis est en face d'immeubles. Frédéric Lapierre : « On va tout faire pour cohabiter au mieux avec nos voisins et qu'ils cohabitent au mieux avec nous. Ça va dans les deux sens. »

Et une Belle électrique qu'ils veulent la plus ouverte possible, en tissant des partenariats avec des associations musicales (une grosse soirée Hadra fin février par exemple) et en l'ouvrant à la scène locale (Lull en première partie de Moriarty mi-janvier, ou une date fin avril pour la sortie du prochain album d'H-Burns). Au vu des attentes placées en elle par tout un tas de monde – le public (les places pour la soirée d'inauguration sont parties en moins d'une heure, même s'il en restera sur place), les tourneurs, les associations locales… – la pression doit être forte ? Frédéric Lapierre : « Ça ne fait pas peur, non. C'est même plutôt excitant. Après, il ne faut pas qu'on déçoive, ce qui est paradoxalement inévitable ! »

Inauguration : samedi 10 janvier


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