"Le Syndrome de Cassandre" : la magie noire selon le clown Yann Frisch

Critique plus qu'enthousiaste du spectacle qui sera à l'Hexagone de Meylan du mardi 17 au jeudi 19 novembre.


Si le spectacle est vivant, c'est parce qu'un public est là pour le lui rappeler : une affirmation qui prend tout son sens dans le cas des clowns. Car sans l'approbation convulsive de spectateurs, leurs gags ne seraient que d'embarrassantes maladresses. De cette dépendance quasi mythologique et du paradoxal lien de méfiance qui la sous-tend (de par sa fonction, un clown ne peut être pris au sérieux), Yann Frisch a tiré un seul-en-scène pour le moins atypique, sorte de huis clos mental où, le teint charbonneux et la voix renfrognée, il tente de combler le vide existentiel qui sépare l'amuseur de son auditoire.

Pour qui a connu ce jeune magicien multi-titré sur les plateaux des nababs du divertissement télévisuel, la métamorphose a de quoi surprendre. Baltass, l'incroyable numéro d'escamotage et de multiplication de balles en mousse qu'il rodait alors, en portait pourtant les prémices : le poil fourni et animé de tics, il y racontait en silence la lutte désespérée d'un homme contre des objets semblant n'en faire qu'à leur tête.

Le Syndrome de Cassandre le voit pousser plus loin cette interaction et la gestuelle insane qui la met en branle à son paroxysme. À la différence près que le trucage, désormais, est plus scénographique que manipulatoire – au point que, malicieux, il se contente d'amorcer à plusieurs reprises son tour phare. Dans une pénombre contagieuse (son humour, qui surgit au détour d'une dispute avec une marionnette maternelle toute fripée, est d'une noirceur terrible), ses propos anti-spectaculaires et ses sautes d'humeur lui donnent l'air d'un Monsieur Fraize de retour d'un stage de cirque. Mais qu'on ne s'y trompe pas : c'est bien un artiste singulier qui se cache sous les nippes de ce clochard funeste.

Le Syndrome de Cassandre
À l'Hexagone (Meylan) du mardi 17 au jeudi 19 octobre à 20h


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