Berlioz, un sacré musicien ; et ce n'est pas le Festival Berlioz qui va dire le contraire !

Chaque fin d'été à La Côte-Saint-André, Berlioz renaît. Le Festival est ainsi devenu un événement musical incontournable pour les amoureux d'une musique française romantique inclassable. 2018, un cru prestigieux. 


Après le succès d'une édition 2017 "so british", le Festival Berlioz se tourne cette année vers les œuvres sacrées de Berlioz et, en même temps, annonce l'acte 1 des commémorations du 150e anniversaire de la mort du compositeur (disparu en 1869). Par son ambiguïté, le thème "Sacré Berlioz" résume bien l'homme à la personnalité singulière : compositeur romantique avant-gardiste, écrivain, poète, orchestrateur hors cadre, maître de l'idée fixe (ce thème principal obsessionnel qui ne vous lâche jamais…), Berlioz poussa l'écriture de ses mélodies comme personne : des phrases fiévreuses, des envolées charnelles, jamais décoratives, des thèmes qui vous collent aux oreilles, absolument. Il fallait oser, sacré festival !

Un festival qui s'ouvrira, samedi 18 et dimanche 19 août à Saint-Pierre-de-Bressieux, sur une grande fête des moissons avec musiques et métiers d'antan. On y retrouvera la folle ambiance d'un village dauphinois comme on y vivait au XIXe siècle : les batteuses, les jeux en bois, la fabrication du pain artisanal et la fanfare des Violons du Rigaudon, constituée de violonneux traditionnels. L'orchestre Les Corsaires Rouges fera quant à lui danser les festivaliers jusqu'au bout de la nuit lors d'un petit bal où chacun pourra s'enivrer avant un feu d'artifice.

Sacrées surprises…

Le programme se poursuivra avec un choc esthétique radical : le Requiem que Berlioz lui-même mettait en première place dans son catalogue. L'exécution de cette œuvre était toujours un moment particulier, avec un orchestre d'une envergure exceptionnelle doublé d'un dispositif visionnaire : quatre orchestres de cuivres et la quadriphonie naquit.

Le compositeur anticipa ainsi sur toutes les expériences de spécialisation chères aux compositeurs du XXe siècle. Là, on entend de purs thèmes grégoriens, là encore, Berlioz fait dialoguer les chœurs, l'orchestre et les solistes. Tout s'ajoute en surabondance et les couleurs musicales deviennent éblouissantes. Avec le très berliozien François-Xavier Roth à la baguette, on s'attend donc à une grande claque esthétique, une belle bourrasque sonore, un moment musical rempli d'émotions uniques. 

Plus tard, au château Louis XI, la cheffe d'orchestre Laurence Equilbey, à la tête de son ensemble Accentus, dirigera la Création de Haydn, une œuvre de maturité, d'une spiritualité à couper définitivement le souffle. Berlioz a toujours été fasciné par le travail de composition de Haydn, harmoniquement éblouissant.

Autre moment sacré, rarement entendu en France : L'enfance du Christ de Berlioz. Avec cette pièce complètement décalée, on est face à un Berlioz qui n'assumait pas totalement l'avoir écrite. Il en présenta un extrait sous un pseudonyme et, à sa grande stupéfaction, L'Adieu des bergers à la Sainte-Famille connut un grand et beau succès. L'œuvre tout entière est un petit bijou inclassable, dans le pur religieux naïf où se déroulent mélodies sucrées sur mélodies suaves – on savoure avec émotion La Fuite en Égypte.

Berlioz mais pas que...

Sinon, au cœur de ce Festival dédié à Berlioz, il ne fallait oublier ni Jean-Sébastien Bach ni Claudio Monteverdi, parce que tous deux ont un rapport puissant à la musique religieuse. Sir John Eliot Gardiner (photo) nous offrira une rencontre avec Bach en plein cœur du pays de Berlioz, un grand écart temporel mais une même vision d'écriture musicale au service du texte religieux. Gardiner et son indéboulonnable chœur le Monteverdi Choir vont sublimer quatre cantates du maître du contrepoint.

Simon-Pierre Bestion, lui, dirigera Les Vêpres de la Vierge, premier chef d'œuvre sacré de Monteverdi. Les partis pris de ce jeune chef sont déroutants, ses propositions artistiques inattendues. La compagnie La Tempête, portée par Bestion, interprètera ces Vêpres avec mise en espace épurée et solo dansé par l'étoile japonaise Rihoko Sato. Un sacré Festival Berlioz en perspective.

Festival Berlioz
À la-Côte-Saint-André du 18 août au 2 septembre 2018


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