"My Songs" : un jour, un des Sting

C'est en réinterprétant ses grands hits que Sting a trouvé cette année une énième manière de se réinventer, passe-temps favori de ce chanteur en perpétuelle mue. Il sera sur la scène du Summum lundi 28 octobre.


Il serait tentant de ne voir en Sting que le dinosaure en chef de ce drôle de machin mal branlé que fut le reggae blanc, puis, en solo, une sorte de crooner tantrique et engagé (l'Amazonie, sa grande cause). Et dans les deux cas un pourvoyeur de hits FM en cascade. Mais on serait loin du compte, Gordon Sumner de son vrai nom s'étant ensuite allègrement empifré à tous les râteliers musicaux qui ont eu l'heur de se présenter devant lui. Pour le meilleur et pour le pire.

Pour le meilleur lorsqu'il bifurqua vers le jazz et le r'n'b aux côtés d'Ira Coleman, Mary J. Blige ou Ibrahim Maalouf ; publia, avec le luthiste bosniaque Edin Karamazov, Songs from the Labyrinth, un album de musique baroque à la reprise de chansons du XVIIe siècle britannique signées John Dowland. Pas rassasié, on le vit ensuite accoucher d'un album hommage aux ouvriers des chantiers navals de Newcastle (The Last Ship) et jouer Dionysos dans un spectacle musical de Steve Nieve.

Sacrés refrains

Dans le pire, on casera, parmi des dizaines (Pavarotti, Youssou N'dour, Eric Clapton, Charles Aznavour, Cheb Mami), des duos avec Mylène Farmer ou Julio Iglesias, un autre plus tardif avec Gims (ne l'appelez plus « maître », il a lâché le barreau) et un album entier avec l'agaçant Shaggy – on pardonne difficilement au duo de nous avoir mis dans la tête le refrain invasif de Just one lifetime, usé jusqu'à la corde par quelque réclame automobile.

Le tableau ne serait pas complet sans évoquer une autre marotte stingienne : faisant peu de cas du caractère prétendument sacré de l'enregistrement canonique comme mètre étalon d'une chanson pop (ainsi que l'entend Agnès Gayraud dans son Dialectique de la pop), le voilà souvent affairé à réenregistrer comme pour les rafraîchir (d'aucuns diraient "sublimer") ses vieilles scies à succès. Chose faite avec Symphonicities où Sting s'entourait de rien moins que le Royal Symphonic Orchestra, The London Players et le New York Philharmonic Concert Orchestra, emballant ses hits dans une matière crypto-prokofievienne.

Dernièrement, voilà que Sting, c'est ce pourquoi il est en tournée, a entrepris de livrer, avec My Songs, un énième best-of dans lequel ses compositions les plus emblématiques sont réenregistrées selon les canons contemporains. Manière de prolonger une relation d'intimité avec les chansons qui partagent sa vie depuis quarante ans, comme on rallume l'étincelle d'un vieux couple.

Sting
Au Summum lundi 28 octobre à 20h


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