Le souvenir des danseurs d'hier

Le Musée de la Résistance et de la Déportation, à Grenoble, se tient prêt à ouvrir sa nouvelle exposition, consacrée aux bals clandestins pendant la Seconde guerre mondiale. En attendant le feu vert, il poursuit sa collecte participative lancée fin janvier.


Alice Buffet, directrice de l'établissement de la rue Hébert, l'assure : c'est une coïncidence, si, à l'heure où les lieux de culture et de spectacle sont fermés partout en France, son équipe et elle espèrent bientôt montrer qu'entre mai 1940 et avril 1945, les Françaises et Français se sont vus interdire de danser. On se souviendra que, frustrés, certains décidèrent d'organiser ou de participer à des bals clandestins. Une expo sur ce thème devait débuter vendredi 9 avril : il faudra attendre que le Musée rouvre pour la voir – elle est programmée jusqu'au 3 janvier prochain. « Inédite, elle est le fruit d'un travail partagé avec des partenaires comme le Centre d'histoire sociale des mondes contemporains de l'Université Paris 1 Sorbonne, l'INA et le Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne ». Alice Buffet explique que danser était très populaire avant-guerre, avec l'arrivée de nouveaux styles et un développement des danses de couple.  « Ce sera ensuite jugé comme contraire à la morale et allant à l'encontre du redressement national ». Et puni comme tel.

« Paperasserie »

Alice Buffet annonce une exposition visuelle et sonore. Quelques photos des bals clandestins existent encore, des témoignages d'ancien(ne)s participant(e)s ont été recueillis, et l'expo évoquera aussi « la masse de paperasserie administrative engendrée par cette interdiction ». Il est prévu qu'elle intègre une section sur l'après-guerre, avec des documents jusqu'à aujourd'hui. Voilà qui nous rend d'autant plus impatient de découvrir la muséographie adoptée !  Avant cela, on avait des questions sur la collecte participative lancée par le Musée fin janvier. Un rappel : jusqu'au 1er juillet, l'établissement s'est mis à l'écoute des propositions de dons. À ce jour, il en a reçu environ 140, de documents ou d'objets, par environ 80 donateurs potentiels. Tout s'opère de manière dématérialisée, avec l'aide possible des équipes du Musée pour qui aurait des difficultés avec le site Internet utilisé. Ces mêmes équipes entrent de toute manière en contact avec les donateurs pour accuser réception des propositions. C'est à partir de juillet que les commissions d'expertise se réuniront pour valider ou non l'entrée des pièces dans les collections du Musée.

Un témoignage subjectif

Et c'est tout ? Non : le Musée travaille en coulisses et, vis-à-vis du grand public, a lancé un feuilleton audio (à découvrir sur sa page Facebook). Réalisé par trois membres de l'équipe, il revient chaque mercredi sur la correspondance de Maurice Rousset, prisonnier de guerre, avec sa famille restée en Isère. En tout, 170 lettres ont été offertes au Musée : un témoignage subjectif d'une grande valeur pour l'établissement, soucieux que le souvenir puisse s'incarner aussi auprès des jeunes générations. On salue l'initiative : même si elle n'est pas parfaite techniquement, elle a le grand mérite de montrer que l'abomination de la guerre peut prendre diverses formes et concerne tout le monde.


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