Comment je me suis disputé/Esther Kahn

ARNAUD DESPLECHIN / Cahiers du Cinéma/Why not ?


La collection DVD des Cahiers du Cinéma avait déjà édité deux films d'Arnaud Desplechin pour le prix d'un (La Sentinelle et La Vie des morts) ; elle y ajoute aujourd'hui deux nouveaux titres, et pas n'importe lesquels. Comment je me suis disputé et Esther Kahn sont disponibles chez d'autres éditeurs, mais le premier est devenu presque introuvable.

Bonne nouvelle donc, car si on peut émettre des réserves sur Esther Kahn, réflexion sur l'enfance de l'art chez une jeune fille sauvage qui se métamorphose en actrice sur les planches londoniennes au début du XXe siècle, il faut louer l'importance de Comment je me suis disputé. Provocateur, Desplechin prend au pied de la lettre les critiques adressées au «jeune cinéma français», et écrit un scénario qui n'est en apparence qu'une accumulation de lieux communs : un jeune agrégé n'arrive pas à finir sa thèse de philo, hésite entre sa copine et celle de son meilleur ami, tombe sous le charme dangereux d'une névrosée à tendance psychopathe, tente de régler ses comptes avec un ancien camarade devenu rival prétentieux...

Le coup d'éclat orchestré par le cinéaste est de transformer cette matière éculée en un film charnel où la parole est en soi de l'action et où chaque sous-intrigue charrie avec elle ses émotions propres (le film est parfois hilarant mais la fin est déchirante). Surtout, il révèle une génération d'acteurs, avec en chef de file Mathieu Amalric, alter-ego parfait de tout spectateur ayant à un moment de sa vie dû affronter le difficile passage de l'adolescence à l'âge adulte.

Christophe Chabert


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