Bloody Sunday à l'Auditorium


"1905" : c'est le titre du prochain spectacle de Dieudonné, mais c'est aussi et surtout le nom de la 11° symphonie de Chostakovitch, poème héroïque composé en 1956 en mémoire de la répression assassine survenue sous le régime tsariste. Le 9 janvier 1905, les troupes du tsar de Russie tirent sur une foule pacifique rassemblée sur la place du Palais d'hiver à Saint-Pétersbourg. Cette date historique passera à la postérité comme le "dimanche sanglant" ou "dimanche rouge", préfigurant la révolution bolchévique de 1917. 50 ans plus tard, après la mort de Staline, Chostakovich pousse à son paroxysme l'utilisation de l'orchestre symphonique pour rendre en quatre tableaux hyper-réalistes cette journée de violence et d'espoir, point d'orgue d'une Russie tiraillée entre mécontentement fataliste et soif révolutionnaire. Le premier mouvement, suspendu, installe l'atmosphère lugubre de la place où sont disposés les manifestants. Le deuxième, stupéfiant d'expressivité, traduit la marche et la fusillade, les percussions et les cuivres trahissant les coups et les cris, tandis que les vagues frénétiques des cordes concrétisent la panique des foules. Adagio déchirant d'après l'émeute, trahissant le deuil révolutionnaire comme la gravité des victimes, le troisième mouvement rejoint la majesté des symphonies de Mahler. C'est Leonard Slatkin, directeur du National Symphonic Orchestra de Washington et de l'Orchestre symphonique de la BBC qui viendra diriger cette gigantesque fresque populaire, si violente et directe qu'on croirait voir les images de cette révolution avortée apparaître au fur et à mesure des saccades frénétiques qui secouent l'orchestre. D'où l'intérêt de voir naître cette musique foisonnante en direct. Deux cerises sur le gâteau vous attendent en prime : une des quatre ouvertures que Beethoven composa pour son opéra Fidelio et la création française du concerto que composa Rautavaraa pour Richard Stoltzman, clarinettiste américain qui viendra l'interpréter lui-même. LHChostakovitch, Symphonie n°11À l'AuditoriumJeudi 31 mars à 20 h 30 et samedi 2 avril à 18 h


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Original, malgré tout