"Feu Jeanne", feu de paille


Qui est vraiment cette Jeanne capturée chaque premier mai par le Front national ? Adèle Gascuel et sa compagnie Sans Trêve tentent dy répondre dans Feu Jeanne, étude de figure de cette gamine de 17 ans qui inversa le cours de la Guerre de Cent Ans.

Nous sommes dans les années 1420, mais ce pourrait être aujourd'hui ou 2ème juste hier, dans les années 60. Car comme dans Foi, où Adèle Gascuel interprétait des écrits de Sainte-Thérèse d'Avila – elle orchestre au contraire cette pièce-ci sans apparaître sur le plateau – la mise en scène d'une femme pieuse mythique est ici un prétexte pour établir des passerelles avec le temps présent et interroger la puissance d'une croyance et, par extension, d'une conviction, notamment politique. Quelle société voulons-nous ? Une monarchie de droit divin ? Une démocratie ? Adèle Gascuel questionne aussi notre capacité à agir concrètement en demandant, en entame de spectacle, au public de construire le bûcher comme on assemble un Lego géant. Soit.

Mais ce volontarisme ne peut pas tout. A vouloir trop embrasser, de Mai 68 à l'Algérie et l'OAS en passant par Charlie Hebdo (!), le propos se dilue au cours de séquences par ailleurs trop longues – à l'exception de celle du procès, très rythmée. Comble pour cette équipe de cinq comédiens survitaminés, la pièce s'essoufle jusqu'à s'évanouir dans une reprise de Ce soir on vous me let feu qui, même fragmentée, même murmurée, même ironique, sonne terriblement faux.

Nadja Pobel

Feu Jeanne
Au théâtre de l'Elysée jusqu'au vendredi 27 février


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