Cinq œuvres à voir cette année

De Phia Ménard à Peter Brook en passant par Thomas Ostermeier, voici cinq œuvres qui vont marquer la saison théâtrale.


P.P.P.

La saison dernière, le TNG offrait une session de rattrapage pour l'époustouflant travail de Phia Ménard sur le corps et sa transformation – Vortex – et sa version pour enfants, L'Après-midi d'un foehn. Chance ! Les Subsistances reprogramment des artistes ayant grandi chez eux, dont cette femme qui reviendra avec P.P.P. : stupéfiant travail de jonglage non plus avec du plastique et de l'air, mais des blocs de glace dont l'inévitable liquéfaction accompagne le récit de la mutation, du changement et de la maturation, éternels sujets sensibles et ô combien maîtrisés par la comédienne-circassienne.

Aux Subsistances du 10 au 12 novembre

Battlefield

En 1985, à Avignon, Peter Brook créait Le Mahabharata, 9 heures pour revenir à l'histoire politique et sanglante de l'Inde ancienne. Avec Battlefield, le plus célèbre des metteurs en scène britanniques livre une sorte d'épilogue, interrogeant plus précisément comment il est possible de régner après avoir tout détruit dans le fameux "espace nu" qu'il a tôt théorisé. À 90 ans, Brook reste une boussole incontournable et exigeante du théâtre et continue d'aller à l'os des maux du monde : « le but de toute représentation théâtrale est de dévoiler ce qui est invisible au point que ça éveille en nous quelque chose d'incroyablement positif : l'espoir » disait-il lors cette création il y a un an.

Au Radiant, les 30 novembre, 1er et 2 décembre

Au théâtre de Villefranche du 7 au 9 décembre

 

Buchettino

Venu au festival Micro-mondes en 2011, le chef d'œuvre du théâtre immersif revient à Lyon, et c'est un cadeau qui ne se représentera peut-être plus car cette pièce a déjà vingt ans, née de la sensibilité de Chiara Guidi, associée à la compagnie de Romeo et Claudia Castellucci depuis le début de leur aventure en 1981. Ce n'est plus au théâtre que vous êtes conviés mais dans une maison de bois transformée en dortoir. 50 lits pour 50 spectateurs qui, couchés, écoutent l'histoire du Petit Poucet racontée par une conteuse. L'ogre rode, l'escalier grince quand il monte à l'étage, les odeurs de forêt sont prégnantes.... tous les sens sont mis à contribution dans cette expérience absolument unique.

Au TNG du 7 au 15 janvier

La Mouette

Pour sa première incursion chez Tchekhov, Ostermeier a choisi une pièce qui lui ressemble : comme il le disait sans ambages dans le très enrichissant documentaire que lui a consacré Arte cet été (toujours visible en ligne), il est question de « comment aimer et comment faire de l'art. » Utilisant des situations d'improvisation en storytelling, il se rapproche au plus près de l'âme des personnages tourmentés sans tomber dans un naturalisme bêta. Avec un casting français (Valérie Dréville en tête), il réalise une pièce beaucoup plus puissante que la première fois qu'il dirigeait dans notre langue le trop appliqué Les Revenants.

Au théâtre de Villefranche du 8 au 10 février

Place des héros

L'épouse d'un mathématicien, à force d'hallucinations auditives et de réminiscences de la voix d'Hitler, souhaite quitter son appartemment qui donne sur la place des héros où un jour de mars 1938, le chancelier du IIIe Reich a proclamé l'Anschluss sous la clameur des Autrichiens. Ce dernier texte de Thomas Bernhard fera scandale à sa création en 1989, au point que l'auteur demandera à ce qu'aucune de ses pièces ne soient publiées ou jouées dans son pays après sa mort, qui surviendra quelques mois plus tard. C'est cette idée que le nazisme n'a pas été vaincu, qu'il suinte par tous les pores de la société que le polonais Krystian Lupa a mis en scène avec un rythme lent, dans la langue lituanienne du théâtre national de Vilnius où la pièce fut créée avant d'être le temps fort de la fin du festival d'Avignon.

Au TNP du 6 au 13 avril


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