Dans la forêt


Gilles Marchand n'a pas peur du genre. Avec son complice Dominik Moll, il a signé, en tant que scénariste ou réalisateur, des œuvres hybrides dans le paysage du cinéma français.

Ce nouvel opus raconte l'histoire de deux frères qui accompagnent leur père en voyage d'affaire en Suède. Au cours du séjour, le trio va s'aventurer dans une forêt gigantesque au risque de briser leur famille et leurs liens avec le monde.

Surprenant, ce film distille une atmosphère vénéneuse qui s'alourdit progressivement. Porté par des interprétations solides d'Elkaïm et des jeunes acteurs, l'intrigue marche sur les traces de Kubrick avec plus ou moins de brio mais reste captivante par le solide travail visuel à la réalisation.

Les cadres et le montage font du décor forestier le quatrième personnage perdu de ce drame psychologique où un garçon doit accepter la monstruosité de son père.


3 questions à... Gilles Marchand

Si l'animal vit dans la forêt, la famille s'y rend pour mourir. Habitué aux recoins obscurs de la psyché, Gilles Marchand éclaircit sa démarche… 

La relation du père et de ses enfants se présente comme la clé du film. Comment avez-vous choisi les jeunes comédiens ?
Gilles Marchand :
 Timothé, qui joue Tom a été une sorte… de coup de foudre. Au casting, on a mis les enfants dans une situation où on leur raconte une histoire effrayante. Je voulais qu'ils en aient peur et en demandent pourtant la suite. Quand Timothé est venu, il a eu cette attitude incroyable pendant quatre minutes. (Rires) Ce qui m'a décidé, c'est sa qualité d'écoute : il dépassait toutes mes espérances. On était très attentifs avec lui et ses parents. Ils étaient très à l'écoute, et en même temps très prudents : ils ne voulaient pas faire n'importe quel film.

Selon vous, s'agit-il d'un drame ou d'un film d'épouvante ?
J'ai du mal à mettre les choses dans une case. Ce qui me plaît, c'est que ça peut donner des émotions au spectateur de natures diverses, qui peuvent être liées à une forme de tension ou de peur. Il y a un côté parcours initiatique que chacun interprète différemment. Il existe toujours quelque chose de fort dans les réactions du public. Certains s'approprient le film en se révoltant contre le comportement du père.

Est-ce que ce rapport paternel vient de votre vécu ou d'une référence cinématographique en particulier ?
Avec Dominik Moll, on avait conscience que le film pouvait croiser la route de Shining de Kubrick, du Sixième Sens de Shyamalan ou de La Nuit du chasseur de Laughton parce qu'il y a des enfants et un parent. Pour ce film-là, il y avait la question du voyage. Et j'avais dit que ça pourrait être celui des enfants qui vont voir leur père car il habite loin. À l'écriture proprement dite, il y avait des petits échanges de dialogues qui sont venus assez vite. Mon travail de cinéaste consiste plus à être dans l'intimité et la logique des personnages qui se tissent petit à petit.


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