Thomas Ostermeier, de retour

Avec des monstres de la scène internationale fidèles à la France (Van Hove, Ostermeier, Simon Stone), l'immense succès - mérité - d'Avignon (Saïgon) et un chef d'œuvre (Festen), la deuxième moitié de la saison théâtrale se fera à un pas cadencé.


Il y a des années sans lui. Et fort heureusement, de nombreuses avec : Thomas Ostermeier sera aux Célestins en mai,  avec un Professeur Bernhardi créé en décembre 2016 sans sa Schaubühne berlinoise. Alors que l'on apprend qu'il dirigera la Comédie française dans La Nuit des Rois, il adapte pour la première fois Schnitzler dans un décor-tableau signé de son éternel scénographe Jan Pappelbaum qui ressemble furieusement à ceux d'Un ennemi du peuple et de sa Mouette. Au TNP, la nouvelle coqueluche australienne associé à l'Odéon, Simon Stone présente sa version des Trois sœurs en attaque de saison. Reste à voir si elle a la magnificence de son Ibsen huis.

Le Britannique Simon McBurney, qui nous avait laissé à distance avec The Encounter mais dont le Mnemonic infuse toujours seize ans après sa vision, revient avec une Pitié dangereuse où justement il dirige la troupe de la... Schaubühne ! Entre mastodontes du théâtre, le dialogue se fait. Enfin, le Flamand Ivo Van Hove qui avait ouvert Avignon 2016 avec des Damnés filmés en live, reprend à l'Opéra son Macbeth plongé dans le monde de la finance et Le Journal d'un disparu du tchèque Janacek, créé en mars dernier à Bruxelles, deux manières de contemporanéiser des œuvres.

Fresques historiques

Créations à part entière, les spectacles Saïgon, Tristesses ou Les Os noirs vont contrebalancer ces adaptations. Le premier (au Théâtre de la Croix-Rousse en avril) est l'aboutissement du travail de Caroline Guiela Nguyen, qui avec ce récit très personnel parvient à rendre sensible l'héritage de l'épisode indochinois. Tristesses (aux Célestins en mars), caméras tous azimuts, est une plongée fictionnelle inquiétante dans la montée d'un parti d'extrême-droite par la belge Anne-Cécile Vandalem. Enfin Les Os noirs (Au TNG en mars) est la dernière œuvre en date de la circassienne épatante Phia Ménard qui se joue des éléments, ici le vent, comme vecteur de survie pour ne pas se laisser engloutir.

Autre cadeau de ce printemps : Où les cœurs s'éprennent (à la Renaissance en mai) de Thomas Quillardet (déjà venu à Lyon avec Villégiature). Avec Marie Rémond (à l'origine de André, biopic rigolard et noir sur le tennisman Agassi), il transpose au théâtre Le Rayon vert et Les Nuits de la pleine lune de Rohmer. Éminemment casse-gueule, le diptyque s'avère aussi léger, drôle, inventif et tragique qu'une romance. Il faudrait encore nommer la création folle et totale de Laurent Brethome, Margot (aux Célestins en janvier), les deux opus de Joris Mathieu en janvier, le retour du chat de Sébastien Barrier (Gus au TNG), la venue du dernier Mouawad au TNP, encensé par nos confrères parisiens cet automne, le Dandin du grand maître Jean-Pierre Vincent (aux Célestins en mars) mais la claque vient du quadra Cyril Teste. Son procédé de performance filmique se heurtait aux vitres de Nobody, démonstration cinglante de l'aliénation par l'absurdité du travail. Dans son adaptation de Festen (aux Célestins en juin), il parvient, au-delà de la vidéo, à redonner une place fondamentale à l'acteur et Mathias Labelle y apparaît prodigieux. Heureux soient ceux qui n'ont pas encore vu le film de Vinterberg !


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