Le dessinateur et auteur Colocho signe une première BD très personnelle, sans entrave à son imaginaire tant graphique que narratif.
C'est une BD qui se lit comme on grandit, avec des fantasmes trimballés de l'enfance qui se cognent au réel. Pour le Villeurbannais Colocho, c'est celui d'être un Indien. Autobiographique, cet ouvrage dont il signe tout – récit et dessins - est celui d'une vie, celle d'un étudiant aux Beaux-Arts qui, par une rencontre furtive avec une jeune femme puis la déferlante Danse avec les loups de Kevin Costner, se prend de passion pour les Premières Nations, une manière de ne pas être accaparé par les colonisateurs qui ici ont le visage diffus de l'âge adulte.
Ainsi Colocho trimballe sa carcasse et celle de ses copains jusqu'à un rendez-vous chez l'idole, un acteur du cinéma Winnetou. Le dessin est remarquable, tout à l'encre de Chine, dressant des paysages parfaitement ciselés et aussi proportionnés que les personnages ne le sont pas, leur conférant ainsi une générosité touchante. Car il y a un brin de naïveté dans ce récit. Non péjorative, elle prend la forme d'une humilité joyeuse qui s'incarne notamment dans les dernières pages lorsque le mini gang se lance dans une course-poursuite mais reconnaît bien vite que tirer en roulant, c'est plus compliqué que dans un film et que le glamour des grands espaces américains est remplacé par une triste gendarmerie en préfabriqué avec un officier qu'on dirait sorti d'un long-métrage de Kervern et Delépine. Ainsi passe ce doux temps « où on enfilait des perles ».
Colocho, Le Temps où on enfilait des perles (Vide Cocagne)
À Terre des Livres le jeudi 8 novembre à 18h