Mystère Flora

Jusqu'au 16 mars la Galerie Slika expose les œuvres énigmatiques sur toile et papier de l'artiste argentine Flora Castiglia : une paisible simplicité recélant un inquiétant secret.


Les œuvres prenant place sur les murs de la grande salle affichent pour la plupart un élément central, solide, impénétrable. Un bouquet de fleurs ou, mieux encore, un vase duquel se répand des formes florales, enfermées dans leur flétrissement. Des couleurs sourdes, des formes sèches et sans vie : quelque chose de définitif a eu lieu.

Un plan géométrique bidimensionnel et hermétique

En exergue de l'exposition, l'artiste a tenu à afficher ces mots : « Tout ne doit pas être vu tel quel. Les informations cryptées doivent être décodées. Rien n'est simple et éphémère ni littéral. L'information peut être trompeuse, il faut s'arrêter un moment pour observer. Le sens est sous-jacent ». Il faut donc se méfier de ce que l'on voit : un secret se niche quelque part, qu'il faut identifier et déchiffrer.

L'artiste, née à Buenos Aires en 1991, dissémine des indices dans ses œuvres, sans pour autant indiquer un chemin à suivre. Dans cette liberté totale, où le paradigme indiciaire ne se laisse jamais totalement saisir, des lettres flottent, formant (peut-être) les mots d'un dialecte rare ou même d'un langage purement personnel. Dans la grande salle de la galerie vibre une glossolalie qui s'ancre dans la trame de dessins et de peintures partageant un à-plat matissien.

À quelques rares exceptions près, les œuvres de Flora Castiglia montrent des intérieurs claustrophobes, où la sobriété n'est rompue que par des éléments fragmentaires et géométriques ainsi que par des taches informes, peut-être d'origine biologique ou extraterrestre. Dans un innocent décorativisme, l'artiste inocule le germe de l'inquiétude : un drame est sur le point de se produire.

Le secret d'un drame, presque imperceptible

Si dans les grands tableaux cette conjonction surprenante du Fauvisme et de peinture métaphysique produit des résultats fascinants, dans les œuvres sur papier, le mystère prend des contours encore plus confidentiels, resserrant l'attention de la pièce vers le fauteuil.

Abandonnant la table avec ses fleurs, on se retrouve assis et absorbés par la lecture d'un livre : La historia de San Michele, best-seller du médecin suédois Axel Munthe. Ce roman inspiré par la splendide villa que le philanthrope fît construire sur l'île de Capri pour y passer ses vacances, devient le support d'autres fleurs et d'autres vases. Un choix anodin, sans doute, mais qui alimente et complique l'énigme de cette peinture.

©Ghislain Mirat

 

Ici, le voile de la vérité perdure dans son opacité, sans avoir révélé rien de ce qui erre librement derrière le seuil impénétrable de l'art de Flora Castiglia. Le secret d'un drame demeure et tout ce qui nous reste, ce n'est qu'une poignée de fleurs séchées.

Penumbra. Flora Castiglia
À la Galerie Slika, Lyon 2e, jusqu'au 16 mars


<< article précédent
On fait quoi ce week-end ?